Israël poursuit sans état d'âme et dans l'impunité internationale les bombardements des quartiers populaires de Ghaza, faisant chaque fois des massacres sans compter parmi les civils. Ces scènes inédites dans les annales des barbaries œuvres de «démocraties» ne soulèvent pas, bien sûr, l'indignation de la communauté internationale, plus préoccupée par la crise de la dette des pays de la zone euro et scandalisée par le refus de Bachar Al Assad de quitter le pouvoir. Le monde arabe dont l'esprit est hanté par les changements démocratiques voulus par l'Occident ne montre pas moins d'indifférence à cette tragédie. Les victimes de Homs, de Benghazi et de Tripoli ont au moins eu droit au chapitre et à la une des médias depuis bientôt une année. Pas les enfants palestiniens ! En Occident, on s'indigne exagérément des «massacres» attribués, à tort ou à raison, tous ou en partie, à l'armée de Bachar Al Assad et à Kadhafi. En revanche, pas une pensée pour les civils de Ghaza ! Pourtant, c'est au nom des victimes civiles que la France et le Royaume-Uni implorent désespérément Moscou et Pékin de laisser faire l'intervention militaire internationale. Au prétexte de «sauver les vies humaines» arabes. En Syrie, pas en Palestine ! A Ghaza, il ne se passe donc rien. Les pays influents du Golfe jouent le silence. La complicité. Leurs intérêts particuliers. Les intérêts de survie du système monarchiste encore plus brutal que la dynastie républicaine qu'elles prétendent combattre. Tout se passe comme si l'argument du «droit d'Israël à se protéger des roquettes de Hamas» passe mieux dans le monde arabe. Même lorsque des enfants sont écrasés sous les bombes israéliennes. L'Otan a monté un bon scénario dans une conjoncture parfaite. Le «Printemps arabe» aura été cette occasion rêvée pour les pays de l'Alliance atlantique d'agir dans plusieurs directions. Objectif majeur : reléguer la question palestinienne à la catégorie des dossiers non prioritaires, qui peuvent donc attendre, et faire l'impasse sur toute résolution sur les crimes israéliens. Méthode : rompre durablement le consensus arabe sur la Palestine et consolider par la violence l'influence occidentale sur la plus instable des régions de la planète, la plus convoitée aussi pour ses richesses pétrolières et sa position géostratégique. C'est ce projet qui est central pour les pays du Golfe. Le projet Bush du «Grand Moyen-Orient» qui se traduit par la séduisante formule Sarkozy de «Printemps arabe» né avec l'invasion de l'Irak. Comment refonder la région du Proche-Orient et du Grand Maghreb, sur la base des intérêts énergétiques et géostratégiques convergents de l'Occident et du Golfe ? Pour que ce projet soit réalisable, il fallait donc reléguer l'intérêt prioritaire des pays de la région pour la question palestinienne. Le consensus arabe rompu Les puissances occidentales savaient dès le départ que la Palestine était l'unique cause commune autour de laquelle le consensus arabe est possible. Plus maintenant que l'on garde le silence face aux crimes répétés d'Israël. Ce consensus, assez fragile d'ailleurs depuis 1947, date de la création de l'Etat d'Israël, difficilement négociable, selon les intérêts en présence des Etats membres de la Ligue arabe, aura été la cible privilégiée des Occidentaux. A travers un plan : le «Printemps arabe». Le massacre des Palestiniens n'est donc plus une priorité dans le rapport de force qui s'est dégagé au sein de la Ligue arabe depuis la guerre de Libye. Le poids penche nettement du côté du groupe des monarchies du Golfe, les alliés privilégiés qui ont fait du coude à coude avec l'Otan dans la campagne de Libye et qui plaident avec insistance, aujourd'hui, pour une intervention militaire du même genre en Syrie. Le tout se résume à dire que la Palestine est en voie d'être sacrifiée pour de bon, au nom des droits de l'homme en Syrie. L'imposture est à son comble lorsque les princes de ces féodalités évoquent les changements démocratiques et les droits de l'homme chez le voisin, le pluralisme politique en Syrie, en Irak, en Egypte, en Libye, en Tunisie. Chez les autres, mais jamais au Golfe où, à la moindre manifestation à Bahreïn, le club du conseil général du CCG a envoyé les tanks saoudiens flambant neuf envahir Manama. Les droits de l'homme, c'est désormais le thème-alibi privilégié qui sert à crédibiliser le rôle qui est dévolu par l'Otan aux monarchies. Cette question est, après le pétrole et le gaz, le fonds de commerce le plus rentable pour Doha et Riyad. Un projet d'investissement politique que ces deux capitales inscrivent en permanence à l'ordre du jour des réunions de la Ligue arabe sur lesquelles le Qatar et l'Arabie saoudite pèsent de tout leur poids. Elles avaient eu l'audace d'organiser, en 2011, la conférence des ministres arabes des Affaires étrangères sur les atteintes aux droits de l'homme en Syrie, dans une autre monarchie tout aussi féodale : le Maroc.