Comme chaque année, Annaba célèbre le jour de l'Achoura dans la piété et le recueillement. Cette année, la fête est exclue pour la plupart des familles compte tenu des événements douloureux qui endeuillent le territoire de Ghaza. Les citoyens rencontrés dans des quartiers du centre-ville avouent que le cœur n'y est pas et que ceux d'entre eux qui observeront le jeûne recommandé par le Prophète (QSSSL), le feront en pensant très fortement aux victimes des raids israéliens. «La coïncidence de cette journée avec ce qui se passe en Palestine est ironique», relèvera avec une certaine amertume ce quinquagénaire, avant de poursuivre : «Avant d'être une fête musulmane, Achoura était une fête juive pour commémorer la délivrance par le Prophète Moïse du peuple d'Israël et leur exode loin de la tyrannie du Pharaon d'Egypte. Et à quoi assistons-nous impuissants aujourd'hui ? Les persécutés d'hier qui marquent leur Yom Kippour par un génocide atroce sur des innocents dont le seul tort est de réclamer la liberté sur leur propre terre. C'est tout simplement révoltant !» Un sentiment de révolte exprimé d'ailleurs avec une plus grande colère dans la même journée par des centaines de jeunes gens, des étudiants pour la plupart, qui ont défilé à travers les principales artères de la ville réclamant l'arrêt immédiat de l'agression sioniste. «Le Prophète Mohamed a recommandé aux musulmans d'observer le jeûne aujourd'hui parce qu'il était convaincu que cette tradition ordonnée aux juifs par leur propre Prophète était commune aux deux peuples. Notre Prophète (QSSSL) expliqua humblement aux croyants que c'était parce qu'il considérait Moïse comme ‘‘plus proche'' d'eux. La triste réalité est là, ces mêmes juifs ne sont ni plus ni moins que des pharaons cruels assoiffés de sang et des spoliateurs», confie à son tour cet étudiant que nous avons abordé au moment où les manifestants s'étaient attroupés en face du théâtre régional Azzedine Medjoubi. Une ménagère affirme, pour sa part, qu'elle observera les deux jours de jeûne, l'Achoura et le jour d'après, comme prescrit par notre Prophète. «Nous préparons un dîner amélioré auquel les plus proches parents seront conviés, comme le veut la tradition dans la région de Annaba. Comme pour le Ramadhan, les sucreries auront une grande place sur la table familiale et nous ferons tout pour amuser les tout petits en leur offrant des cadeaux. Les hommes prieront avec ferveur de leur côté, soit à la mosquée soit à la maison, mais je dois préciser que ce ne sont pas toutes les familles qui perpétuent cette tradition, il y en a qui se limitent à la chakhchoukha et à la rechta agrémentées de volaille.»