Le phénomène de la mendicité fait aujourd'hui partie du décor de toutes les rues d'Alger et des grandes villes du pays. Au nombre déjà élevé de mendiants en Algérie vient s'ajouter celui des réfugiés syriens qui ont élu domicile en des endroits stratégiques tels que le Square Port-Saïd à Alger. En effet, les réfugiés syriens ayant déclaré être arrivés en tant que touristes et qui ont refusé de s'installer au centre de Sidi Fredj font déjà de la concurrence aux Algériens dont le nombre est inconnu. Justement, en l'absence de statistiques fiables, il est difficile d'évaluer le phénomène de la mendicité à ses justes proportions. Néanmoins, la multiplication des mendiants à l'intersection des rues, au niveau des passerelles, sur les trottoirs, devant les magasins, les mosquées, dans les bus... nous renseigne sur le nombre important de ceux qui vivent en dessous du seuil de pauvreté en Algérie. En sillonnant les rues de la capitale, on rencontre plusieurs catégories de mendiants dont un grand nombre sont infirmes, malades mentaux, et des femmes traînant derrière elles leurs enfants. Il y a aussi ceux qui suscitent des interrogations. Ils ont l'air d'être en bonne santé et relativement bien vêtus. Pour ces derniers, la mendicité est tout bonnement érigée en métier. Comédie et déguisements Tôt le matin, des dizaines de mendiants vêtus de haillons prennent d'assaut les marchés, les mosquées, les banques et les restaurants de la ville. Ils squattent les trottoirs, partout, tendent la main, c'est tellement facile à faire, et au final, ça peut rapporter gros. C'est le retour en force des mendiants durant ce mois sacré du Ramadhan. Interrogé sur les vrais et faux mendiants, un usager de bus nous dira : «Chaque matin, un jeune homme qui habite pas loin de mon quartier à la place du 1er Mai se déguise en mendiant, se lève tôt et se dirige vers la gare routière. Avant le départ des voyageurs, il monte dans les cars et les autobus pour mendier. C'est un jeune en très bonne santé mais il porte des vêtements déchirés et sales pour induire les gens en erreur». De nos jours, les choses se compliquent à telle enseigne qu'il est devenu difficile de faire une distinction entre les vrais et les faux mendiants. Ces gens se cachent derrière cette apparence pour ne pas chercher un travail honnête. La mendicité, au fil des temps, devient une seconde nature qui tue le désir et la volonté de travailler, de faire des efforts pour vivre de sa sueur. Ils sont partout, même dans les mosquées Vieux, jeunes, handicapés, non-voyants, femmes et enfants s'adonnent à cette pratique qui prend une grande ampleur pendant le Ramadhan. Dans la commune de Shaoula, comme dans d'autres quartiers de la capitale, c'est devenu un débat d'actualité ou plutôt un problème à prendre en compte. En effet, depuis ces derniers mois, dans plusieurs mosquées, beaucoup de citoyens dénoncent une nette augmentation de la mendicité à l'intérieur même des mosquées. Après chaque prière, plusieurs personnes se lèvent en effet pour demander une aide aux fidèles, quelques fois plusieurs fois par jour. Une nouvelle façon de faire qui s'est intensifiée lors du Ramadhan alors que beaucoup d'imams insistent sur l'interdiction de recourir à cette méthode. Chaque jour, leur nombre s'accroît. Une virée dans la capitale permet de constater de visu cet état de fait. Que ce soit à Alger-Centre, Bab El Oued, à la place du 1er Mai, El Biar, Chevalley, Bouzaréah..., les mosquées sont devenues la cible des mendiants. Pour comprendre l'ampleur du problème et traiter ses causes profondes, les services sociaux peuvent réaliser des enquêtes scientifiques sur tout le territoire national pour évaluer à sa juste valeur la dimension du phénomène de la mendicité. Certes des études ont été menées sur ce sujet, elles avaient eu le mérite de poser le problème mais leur évaluation statistique ne peut refléter la réalité du phénomène. Des conditions d'accueil et d'insertion appropriées doivent être prévues pour les catégories vivant dans des difficultés à savoir les femmes en situation difficile, les individus à besoins spécifiques et les personnes âgées sans ressources.