Le Mali s'est finalement doté d'un nouveau gouvernement d'union nationale, une étape vers le rétablissement de l'ordre constitutionnel et le règlement de la crise dans le pays qui passe en premier lieu par la reconquête des régions du nord, sous contrôle de groupes armés depuis le coup d'Etat de mars dernier. Ce "gouvernement d'union nationale" dirigé par Cheick Modibo Diarra, qui conserve son fauteuil de Premier ministre, est composé de 31 membres dont deux ministres-délégués et quatre femmes. Il s'agit d'un remaniement opéré par le président par intérim Dioncounda Traoré en réponse à la demande des chefs d'Etat de la Communauté économique des Etat d'Afrique de l'Ouest (Cédéao), composée de 15 pays dont le Mali. Le président intérimaire a validé lundi la composition du nouveau cabinet de transition pour tenter de rétablir l'ordre constitutionnel dans le pays en crise politique depuis le coup d'Etat du 22 mars. Dix-huit membres de la précédente équipe, qui en comptait 24 dirigée par Cheick Modibo Diarra conservent leur poste, même si certains changent de portefeuilles. Parmi les ministres ayant été maintenus à leurs postes, ceux de la Défense (colonel-major Yamoussa Camara), de la Sécurité (général Tiéfing Konaté), de l'Administration territoriale (colonel Moussa Sinko Coulibaly), de la Justice (Malick Coulibaly) et de la Santé (Soumana Makadji). Les départs les plus remarquables sont ceux du ministre d'Etat chargé des Affaires étrangères, Sadio Lamine Sow, et du ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement, Hamadoun Touré. Le portefeuille des Affaires étrangères a été octroyé à Tiéman Coulibaly, dont le parti politique est membre du Front pour la démocratie et la République (FDR, front anti-putsch). En outre, un ministère a vu le jour, celui des Affaires religieuses et du Culte, confié au Docteur Yacouba Traoré. Aussi, un Touareg, Ousmane Ag Rhissa, a fait également son entrée dans le nouveau cabinet comme ministre de l'Artisanat et du Tourisme. Selon un communiqué présidentiel, cinq postes au sein du nouveau gouvernement ont été choisis par le pouvoir militaire. La formation d'un gouvernement d'union nationale au Mali avait été exigée par la Cédéao qui avait donné à Bamako un ultimatum jusqu'au 31 du même mois. L'ultimatum avait par la suite été prorogé. L'organisation ouest-africaine veut que le gouvernement malien soit doté de bases solides pour pouvoir reconquérir le nord du pays, aux mains de groupes armés dont certains sont affiliés au réseau terroriste Al-Qaïda depuis le putsch qui a conduit au renversement du président Amadou Toumani Touré. Les trois grandes villes et régions administratives du nord du Mali, Tombouctou, Kidal et Gao, sont tombées aux mains des groupes armés qui étaient aidés par les rebelles touaregs du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA). Reconquérir le nord n'est toutefois pas une simple sinécure, vu l'état dans lequel se trouve l'armée malienne, sous équipée, alors que la situation dans les régions du nord reste confuse. Peu d'informations circulent concernant les groupes armés actifs dans la zone, dont l'effectif et les capacités sont inconnus. Le MNLA, l'un des principaux mouvements de la rébellion touarègue, qui avait lancé l'offensive dans le nord en janvier, avait été chassé par d'autres groupes armés dont certains liés à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), dont Ansar dine. La Cédéao s'est dite prête à envoyer au Mali une force armée de quelque 3.300 hommes, mais dit attendre pour cela une demande formelle des autorités de transition à Bamako ainsi qu'un mandat de l'ONU. La première phase du plan de la communauté économique des Etats d'Afrique de l'ouest prévoit le débarquement des troupes étrangères à Bamako pour sécuriser les institutions de la transition. Mais les autorités maliennes ont rejeté catégoriquement cette proposition, affirmant que c'est à elles qu'incombe cette tâche. Le deuxième phase du plan parle de la formation de troupes maliennes. Enfin, la troisième phase est la reconquête du nord du Mali. Et sur ce point, l'armée malienne entend être au centre du dispositif. Bamako estime que l'"option militaire" était "inévitable" dans le Nord, affirmant que "les pratiques des terroristes et des narcotrafiquants habillés d'un faux voile religieux, accréditent le caractère inévitable de l'option militaire". Pour le général Carter Ham, haut commandant des forces armées américaines en Afrique (Africom), la solution de la crise dans le nord du Mali, n'était pas "uniquement" militaire, mais aussi politique. "Les défis qui se posent au niveau du Mali doivent être d'abord résolus au plan politique, tout en prenant en compte l'aspect humanitaire", a estimé le responsable militaire américain. Sur le plan humanitaire, la situation dans nord est de plus en plus difficile. Le chef de la délégation du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) pour le Mali et le Niger, M. Jean-Nicolas Marti, a mis en garde contre l'aggravation de la crise humanitaire dans cette région, où 160.000 personnes sont dans le besoin, à cause de la crise alimentaire et du conflit armé.