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«Le président François Hollande doit juger les auteurs du massacre du 17 octobre 1961» Mireille Mendès-France, fille aînée de Frantz Fanon, au Temps d' Algérie :
Mireille Fanon Mendès-France, fille aînée de l'auteur des «Damnés de la terre», Frantz Fanon, et présidente de la fondation du même nom, évoque, dans cet entretien, la visite prochaine du président François Hollande en Algérie et exprime son soutien à la veuve de Maurice Audin, auteure d'une lettre adressée au chef de l'Etat français. Cinquante-six ans après la disparition de son mari pendant la Bataille d'Alger, Josette Audin demande au président Hollande de condamner fermement la torture pratiquée par la France pendant la Guerre d'Algérie. Egalement experte du groupe de travail sur les Afro-descendants au Conseil des droits de l'Homme de l'ONU, Mireille Fanon Mendès-France évoque l'enterrement prévu pour fin novembre en cours du général Bigeard, la répression sanglante du 17 octobre 1961 et la situation au nord du Mali. Le Temps d'Algérie : Josette Audin, épouse de Maurice Audin, disparu il y a 56 ans pendant la Bataille d'Alger, a adressé récemment une lettre au président François Hollande, lui demandant de condamner fermement la torture pratiquée par la France pendant la guerre de Libération. Qu'en dites-vous ? Mireille Fanon Mendès-France : On ne peut que s'inscrire dans la démarche de Madame Audin. Il faut que toute la vérité soit faite sur la disparition de Maurice Audin, comme il faut que toute la vérité soit dite sur l'histoire de la colonisation française de l' Algérie. Je comprends totalement la démarche de Madame Audin. La vérité et la justice doivent être établies. On ne peut pas avoir des relations claires, transparentes avec les pays anciennement colonisés si l'on ne dit pas la vérité. C'est à ce prix seulement que la page pourrait être tournée entre les deux pays qui pourraient, ainsi, démarrer sur de nouvelles bases. C'est indispensable que les deux parties disent toute la vérité. Le président de la République française François Hollande a récemment reconnu la répression du 17 octobre 1961. Les propos du président français à l'occasion de la commémoration de ces faits cette année peuvent-ils être, selon vous, un pas important vers la reconnaissance des crimes commis par le colonialisme en Algérie pendant la guerre ? Ce qu'a dit le président François Hollande lors de la commémoration, cette année, des événements du 17 octobre 1961, est insuffisant. Il aurait dû préciser que ces événements douloureux ont eu lieu dans le cadre de la volonté du peuple algérien d'arracher sa liberté et son indépendance. Il aurait dû dire que ce sont des crimes qui ont été commis contre des manifestants pacifiques dont la seule demande était l'obtention de l'indépendance de leur pays. Le président François Hollande doit reconnaître que ce sont des crimes qui ont été commis le 17 octobre 1961 contre les manifestants pacifiques algériens en France. Les auteurs de ces crimes doivent être jugés. Comment concilier les deux pays par rapport à leur histoire commune ? Il faut que chacune des deux parties dise la vérité sur ce qui s'est passé durant la colonisation. C'est à ce prix seulement que la page pourrait être tournée entre les deux pays. Il faut que toutes les vérités soient dites quelles que soient les parties qui en étaient auteures. C'est à ce prix seulement que cessera le racisme en France envers les Algériens. Beaucoup de Français croient que les Algériens et les Arabes sont une race inférieure à la leur. La pensée française dominante, actuellement, est que les Français sont une race supérieure à la race des Algériens et des Arabes. C'est du racisme qu'on ne peut éradiquer que si la vérité, toute la vérité, soit dite sur la colonisation de la France en Algérie et que soient dites les exactions commises quels qu'en soient les auteurs. La répression du 19 octobre 1961 relève également du racisme. Le président François Hollande devait justement dire que la répression du 17 octobre 1961 relève aussi du racisme. Le général Bigeard sera enterré fin novembre à Toulon… Oui, le général Bigeard sera enterré fin novembre à Toulon. Il faut être contre l'idée de l'honorer au cours de ses funérailles. Il faut aussi dénoncer le musée de la mémoire de Perpignan. Il n'y a aucun appareil critique pouvant faire face au contenu de ce musée. Le président François Hollande est attendu en Algérie avant la fin de l'année en cours. Voudriez-vous lui lancer un appel en cette occasion ? Le président François Hollande vient en Algérie pour les intérêts de la France. Il vient, également, pour le dossier du nord du Mali. Je dis à M. François Hollande : n'exercez pas de pressions sur l'Algérie pour imposer la solution qu'il veut à la situation au nord du Mali. Je lui dis : laissez les Algériens, les Maliens et les membres de l'Union africaine se concerter entre eux et décider d'eux-mêmes des solutions à apporter à la crise malienne. C'est à eux et seulement eux de décider d'accepter ou non une intervention militaire étrangère, loin de toute pression. C'est à eux de choisir la solution.