Le secrétaire d'Etat américain John Kerry rencontre mardi à Berlin son homologue russe Sergueï Lavrov pour tenter de trouver une issue en Syrie, à deux jours d'une réunion internationale à Rome à laquelle le chef de la diplomatie américaine a convaincu l'opposition syrienne de participer. Ces tractations diplomatiques en Europe se déroulent au moment où le régime du président Bachar al-Assad se dit prêt, pour la première fois, à dialoguer avec les rebelles armés pour mettre fin à la guerre. Cette offre de négociations a toutefois été rejetée par les insurgés tant que M. Assad restera au pouvoir. M. Kerry effectue jusqu'au 6 mars sa première tournée à l'étranger de ministre des Affaires étrangères et profite de l'étape berlinoise pour rencontrer en tête-à-tête M. Lavrov. Les deux hommes se connaissent du temps où le nouveau secrétaire d'Etat était président de l'influente commission des Affaires étrangères du Sénat. Dernière grande puissance à entretenir des liens étroits avec Damas à qui elle livre des armes, Moscou a bloqué, avec Pékin, les trois projets de résolution du Conseil de sécurité de l'ONU contre la Syrie. Washington a fustigé pendant des mois l'intransigeance russe, avant d'adoucir un peu ses critiques. Un responsable du département d'Etat a ainsi expliqué aux journalistes accompagnant M. Kerry que "la Russie peut jouer un rôle crucial pour convaincre le régime (syrien) (...) de la nécessité d'une transition politique". Le diplomate américain ne compte cependant pas sur une "percée majeure" à l'issue du face-à-face Kerry-Lavrov. Le Russe a d'ailleurs averti, en recevant lundi à Moscou son homologue syrien Walid al-Mouallem, qu'il n'y avait "aucune alternative acceptable au règlement politique par le dialogue entre le gouvernement et l'opposition". Le conflit a fait, selon l'ONU, 70.000 morts depuis mars 2011, mais M. Lavrov a répété que c'était au peuple syrien de "décider de son sort, sans intervention extérieure". La Coalition de l'opposition syrienne réclame justement davantage à la communauté internationale et menaçait depuis samedi de boycotter la réunion des Amis du peuple syrien à Rome jeudi. Ce rendez-vous entre des opposants syriens et les 11 pays qui les soutiennent doit être le point d'orgue de la tournée de M. Kerry en Europe et dans des pays arabes. Au terme de 36 heures de déclarations et de tractations en coulisses, le secrétaire d'Etat a réussi lundi soir à persuader au téléphone le chef de la Coalition, Ahmed Moaz al-Khatib, de faire le voyage à Rome. M. Khatib a assuré qu'il irait finalement en Italie --et un responsable du département d'Etat l'a confirmé-- parce que M. Kerry et son homologue britannique William Hague avaient "promis des aides spécifiques pour soulager la souffrance de notre peuple". "Je veux que nos amis du Conseil de l'opposition syrienne sachent que nous ne venons pas à Rome simplement pour parler. Nous allons à Rome pour prendre une décision sur les prochaines étapes (...), même si je tiens à souligner que la politique des Etats-Unis est de rechercher une solution politique", avait déclaré auparavant à Londres M. Kerry, aux côtés de M. Hague. En prenant ses fonctions début février, le secrétaire d'Etat avait évoqué une prochaine initiative "diplomatique" sur la Syrie. Washington s'en tient depuis des mois à une aide "non létale" à la rébellion syrienne, mais l'administration de Barack Obama a été divisée pendant l'été 2012 sur l'opportunité ou non d'armer l'opposition syrienne. Les 27 de l'Union européenne ont également de profondes divergences sur un assouplissement de l'embargo sur les armes pour les opposants syriens. Londres avait plaidé pour, mais sans succès: le 18 février, l'UE a accordé un "soutien non létal" plus conséquent aux rebelles, se donnant jusqu'en mai pour trancher sur la levée de l'interdiction de livrer des armes. En attendant, le régime syrien, par la voix du ministre des Affaires étrangères Walid al-Mouallem a déclaré être "prêt au dialogue avec tous ceux qui veulent le dialogue, y compris les groupes armés". Mais le chef d'état-major de l'armée rebelle en Syrie, Sélim Idriss, a rétorqué qu'il négocierait seulement "après l'arrêt de toutes les tueries et le retrait de l'armée des villes" et après le départ de M. Assad