Décidément, l'Etablissement arts et culture est vraiment décidé à continuer sur sa lancée. Après avoir marqué le point durant le Ramadhan en invitant les meilleurs chanteurs et groupes et en organisant des hommages aux artistes et hommes de culture, l'établissement a programmé des rencontres débats mensuelles sur le théâtre. La première de ces rencontres s'est tenue mercredi à l'auditorium du théâtre de verdure Laâdi Flici. Pour débattre du thème «La critique théâtrale en Algérie», l'établissement a invité justement la crème de la critique, Ahmed Cheniki, Hadj Miliani, Bouziane Benachour et Djamila Mostefa Ezzegai, pour mener les débats. Même si certains journalistes se sont éloignés du sujet en se plaignant de la gestion de leurs journaux et même de leur situation, l'objectif de la rencontre a été atteint. Le théâtre, enfant pauvre de la presse Le critique et auteur Bouziane Benachour, qui connaît bien la presse puisqu'il continue à servir le théâtre et la culture par ses écrits réguliers, a noté le fait que l'on envoie souvent les journalistes débutants pour couvrir les événements culturels, notamment le théâtre. Il a regretté que le rédacteur d'un quotidien à fort tirage ait décidé un jour de supprimer la page culturelle. Bouziane Benachour a noté le fait que par manque de formation, les journalistes sont devenus malgré eux des donneurs de leçons (didactiques), notamment lors des représentions de théâtre pour enfants. Hadj Miliani, professeur à l'université de Mostaganem, a également signalé le mépris envers le théâtre et la culture dans la presse algérienne. Pour faire une petite comparaison, le professeur Ahmed Cheniki a relevé que dans ses recherches, il n'a pas pu compter le nombre d'articles écrits sur le théâtre entre 1920 et 1962. Il y avait tellement d'articles qu'il est très difficile de faire des statistiques. Il a ajouté qu'à cette période la publicité pour le théâtre était gratuite dans tous les journaux. Ahmed Cheniki a touché directement le cœur du problème de la critique du théâtre en Algérie en signalant que dans ce domaine on ne peut pas éviter la subjectivité. Cheniki, qui est l'auteur de plusieurs ouvrages sur le théâtre, a indirectement encouragé les journalistes à ne pas avoir peur de critiquer les pièces de théâtre, car «dans la critique théâtrale, il n'y a pas de règles scientifiques». Il a précisé que les travaux des universitaires n'apportent pas assez pour le théâtre par rapport aux écrits des journalistes. La critique est nécessaire A ce sujet, présent dans la salle, le metteur en scène Ziani Cherif Ayad a indiqué que la critique journalistique lui a souvent permis de se corriger et de s'améliorer. «J'ai besoin du regard de la critique pour approfondir ce que je fais», a-t-il déclaré. De son côté, M. Khellaf, diplômé en critique d'art de l'école de Bordj El Kiffan, s'est demandé pourquoi former des gens dans cette spécialité pour leur donner des postes qui n'ont rien à voir avec leur domaine. Ahmed Cheniki a tenu à signaler le fait que les chercheurs donnent plus d'importance à la littérature qu'au théâtre. Il a regretté que ces chercheurs s'intéressent aux ouvrages littéraires de Kateb Yacine tels que Nedjma, mais pas à ses textes dramatiques. Avec cette journée d'étude, la sonnette d'alarme a été tirée. L'Etablissement arts et culture consacrera les deux prochaines journées aux hommes de théâtre vivant ou ayant vécu à l'étranger et à la gestion des théâtres. Pour ce deuxième sujet, Ahmed Cheniki a déjà tiré la sonnette d'alarme, car en Algérie, on n'a jamais pensé à la formation de gestionnaires de théâtre.