Le vice-Premier ministre Li Keqiang, numéro deux du Parti communiste chinois (PCC), a été désigné vendredi comme prévu chef du gouvernement de la deuxième puissance mondiale, désormais dirigée par une nouvelle équipe pour les dix ans à venir. Après avoir choisi jeudi Xi Jinping pour présider la République populaire, le Parlement, convoqué pour sa session annuelle, a ainsi parachevé une transition au pouvoir prévue depuis des années. M. Li, 57 ans, un apparatchik réputé bien connaître les ressorts de l'économie, a recueilli 99,69% des voix des quelque 3.000 délégués de l'Assemblée nationale populaire (ANP), un plébiscite quasi-unanime comparable aux 99,86% enregistrés la veille par Xi Jinping. "J'annonce que le camarade Li Keqiang devient Premier ministre de la République populaire de Chine", a déclaré la vice-présidente de cette assemblée réunie dans le Grand Palais du Peuple, imposant bâtiment d'architecture stalinienne situé place Tiananmen. Sur le papier, le Parlement chinois dispose de prérogatives étendues. Dans les faits, toutes les grandes décisions sont prises par un cercle restreint de hauts dirigeants du PCC, et au premier chef par les sept membres du Comité permanent du Bureau politique, le "saint des saints" du pouvoir. Sitôt le résultat annoncé, Li Keqiang s'est levé de son siège, s'est incliné face aux délégués, a échangé une poignée de main avec Xi Jinping, puis avec son prédécesseur Wen Jiabao, sous les applaudissements résonnant dans l'immense auditorium au plafond décoré de l'étoile rouge. M. Wen a conduit durant 10 ans, sous la présidence de Hu Jintao, le spectaculaire essor économique chinois marqué par une croissance moyenne de plus de 10%, mais tombée l'an dernier à moins de 8%. Li Keqiang, un technocrate au sourire relativement facile, aura pour tâche principale de réorienter l'économie chinoise vers un modèle davantage tourné vers la consommation des ménages que vers l'exportation et les grands projets d'infrastructure de ces dernières années. Depuis qu'il a pris en novembre, lors du 18e congrès du PC chinois, la deuxième place des sept postes du Comité permanent du Bureau politique, M. Li a conservé un profil assez bas. Il a toutefois promis d'agir, pour combler le fossé grandissant entre riches et pauvres dans cette Chine qui s'urbanise très vite, et en faveur d'un développement prenant mieux en compte l'environnement, face aux inquiétudes accrues de la population, notamment sur la qualité de l'air. La mesure la plus spectaculaire, annoncée le week-end dernier, a été une vaste restructuration des grandes administrations du pays, afin d'en améliorer l'efficacité entravée par la bureaucratie et la corruption. Le ministère des Chemins de fer, dont la réputation était durement entamée par des scandales, a ainsi été démantelé. Li Keqiang est né en juillet 1955 dans la province de l'Anhui (centre), comme l'ex-chef du Parti et de l'Etat Hu Jintao, son mentor. Comme Xi, Li fait partie de cette génération de "jeunes instruits" (zhiqing) envoyés dans les campagnes par Mao Zedong au moment de la Révolution culturelle. Plus tard, ce responsable qui parle couramment l'anglais a notamment été patron de la grande province industrielle du Liaoning (nord-est), de la province pauvre du Henan (centre) et de la Ligue de la jeunesse communiste. Il doit prononcer dimanche sa première grande conférence de presse en clôture de la session parlementaire, un exercice annuel du Premier ministre, où les questions des journalistes choisis sont souvent servies sur un plateau.