Hu Jintao, qui doit céder son poste de secrétaire général du PCC à Xi Jinping, a averti son héritier que la corruption fait courir au système chinois le danger de sa chute. Le 18e congrès du PC chinois s'est en effet ouvert jeudi devant plus de 2000 délégués sur un cri d'alarme du président sortant qui a prévenu que la corruption endémique du pays pourrait s'avérer “fatale" au régime et appelé à plus de démocratie dans une économie réorientée vers la consommation intérieure. Un aveu lourd de sens pour un système politique qui a conjugué communisme et capitalisme depuis la mort de Mao, balayant toute idée de contradiction et de confrontations sociales. “Si nous échouons à traiter cette question correctement, elle pourra s'avérer fatale et provoquer l'effondrement du parti et de l'Etat", a lancé le secrétaire général sortant du PCC et président de la République. Plusieurs scandales politico-financiers impliquant les familles des plus hauts dirigeants, dont un membre du bureau politique, Bo Xilai, exclu du parti et en attente de jugement, sont sur la voie publique en Chine en dépit de la censure. Même le président sortant et son premier ministre, Wen Jiabao, sont sur la liste des présumés corrompus. Xi Jinping qui doit prendre la succession est appelé par ses pairs du PCC à mettre en œuvre “un nouveau modèle de croissance" tourné vers la consommation plus que vers les exportations. Le parti lui a fixé comme objectif d'ici 2020 le doublement du PIB et du revenu par tête, actuellement de quelque 3500 dollars/an dans les villes. Si la croissance à deux chiffres n'est plus qu'un lointain souvenir, la demande intérieure tirera l'économie chinoise à un rythme de 7 à 8% l'an et, selon les économistes du pays, au bout de 10 ans, le doublement du PIB est très probable. Par ailleurs, les économies occidentales ont également salué cette nouvelle orientation de la deuxième économie mondiale, car une partie de leur crise est due au net ralentissement de la croissance chinoise. L'autre dossier brûlant pour le nouvel homme fort de la Chine : les réformes politiques, un domaine dans lequel le bilan de ses successeurs est jugé des plus minces. La Chine, seconde puissance du monde, est fortement interpellée de l'intérieur pour réformer son système politique. Acculés par une opinion qui s'en laisse de moins en moins conter, les congressistes acceptent l'idée d'avancer “activement et prudemment" dans la voie démocratique. La réforme politique prônée par les responsables communistes chinois consiste à séparer plus clairement les rôles du Parti et de l'Etat et à permettre plus de participation de la population dans le choix des dirigeants locaux, mais en aucun cas à instaurer un multipartisme et encore moins à promouvoir les libertés d'expression et d'organisation. Il faut dire qu'au PCC, la famille révolutionnaire n'est pas près de se faire hara-kiri. Sur la scène de l'immense hall du Palais du peuple, tendue de rouge, les congressistes s'expriment sous le regard des anciens du Parti et de l'Etat, dont l'ex-président Jiang Zemin, 86 ans (1993-2002), ou l'ex-Premier ministre Li Peng, 84 ans, en fonction au moment de la répression du “Printemps de Pékin" de 1989. Au terme des travaux du congrès, qui doit se prolonger jusqu'à mercredi prochain, Xi Jinping, un homme d'appareil largement inconnu du grand public, doit prendre la relève de Hu, en principe pour deux mandats de cinq ans. Dauphin désigné, Xi, vice-président depuis 2008, doit être nommé au poste de secrétaire général du PCC, ce qui fait de lui ipso facto le prochain président de la République populaire, une formalité prévue en mars 2013. “Fils de prince", son père a combattu aux côtés de Mao Tsé-toung, fondateur du PCC et de son système, Xi Jinping devra, comme ses prédécesseurs, rechercher en permanence le consensus auprès de ses pairs du comité permanent du bureau politique, l'organe suprême du PCC, qui doit aussi être renouvelé. Ses membres pourraient passer de neuf à sept, afin de faciliter les prises de décision en réduisant les risques de conflit entre conservateurs et réformistes. En dépit de son départ, Hu Jintao pourrait conserver la présidence de la puissante commission militaire du PCC et maintenir ainsi son influence. D. B