L'Espagne a annoncé mardi l'arrestation de deux militants présumés d'Al-Qaïda, d'origines algérienne et marocaine, présentés comme des "loups solitaires" qui auraient été approchés via Internet par des responsables de la branche maghrébine du réseau au Mali. Les deux suspects ont été arrêtés mardi à Saragosse, dans le nord de l'Espagne, et à Murcie, dans le sud-est, au terme d'une enquête menée depuis plus d'un an par la police espagnole, en coopération avec les polices française et marocaine. "Leur profil correspond à celui que nous pourrions qualifier de 'loup solitaire'", a expliqué le ministre de l'Intérieur, Jorge Fernandez-Diaz, "comme le fut Merah en France ou comme les deux Tchétchènes auteurs des attentats de Boston". Les deux hommes "sont soupçonnés d'avoir fait partie d'une cellule radicale jihadiste appartenant à Aqmi" ou Al-Qaïda au Maghreb islamique, a indiqué le ministre, ajoutant que les services de renseignement espagnols avaient "coopéré de manière très étroite avec ceux d'autres pays" dans cette enquête. "La menace est globale", a-t-il souligné. "La menace en Espagne n'est pas plus importante qu'ailleurs. Nous avons une menace commune. La réponse doit être commune". Les deux hommes, qui doivent comparaître jeudi au tribunal de l'Audience nationale à Madrid, chargé des affaires de terrorisme, ont été présentés par une source judiciaire comme des militants qui "se seraient radicalisés ces derniers temps, accédant à des sites radicaux jihadistes". Selon cette source, "il n'existe pas pour le moment d'éléments permettant de dire qu'ils appartiendraient à une cellule d'Al-Qaïda, sans préjuger de faits nouveaux qui pourraient apparaître". En revanche, selon le ministère de l'Intérieur, les deux hommes présenteraient "un profil" évoquant ceux des suspects de l'attentat du marathon de Boston, les deux frères d'origine tchétchène Djokhar et Tamerlan Tsarnaev, qui avaient émigré au début des années 2000 aux Etats-Unis avec leurs parents. M. Fernandez-Diaz a également évoqué des ressemblances avec le parcours de Mohamed Merah, auteur de plusieurs assassinats à Toulouse, en France, en mars 2012. Ce petit délinquant rallié à un islam radical avait assassiné trois parachutistes, et un professeur et trois enfants d'une école juive, avant d'être abattu par les forces de l'ordre. Nou Mediouni, d'origine algérienne et arrêté à Saragosse, "était usager d'une plateforme radicale islamiste connue, depuis laquelle des responsables d'Aqmi, basés au Mali, procédaient au recrutement de candidats au profil radical", a expliqué le ministère dans un communiqué. Ainsi recruté, l'homme "avait reçu des instructions pour un voyage vers un camp d'entraînement jihadiste situé dans le nord du Mali". La forte présence policière internationale sur le terrain avait fait échouer ce projet et le suspect "avait dû regagner l'Espagne, témoignant d'un important niveau de frustration pour ne pas avoir pu 'mourir en martyr' comme il le souhaitait", ajoute le communiqué. Quant à Hassan El Jaaouani, d'origine marocaine et arrêté à Murcie, "il aurait lui aussi eu des contacts avec des responsables d'Aqmi basés au Mali et chargés du recrutement de militants radicaux en Espagne", selon le ministère de l'Intérieur. Frappés le 11 mars 2004 par des attentats islamistes contre des trains de banlieue à Madrid, qui avaient fait 191 morts, l'Espagne a procédé depuis à de nombreuses arrestations dans les milieux islamistes. Au total, selon le ministère de l'Intérieur, 13 militants islamistes présumés ont été arrêtés depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement de Mariano Rajoy à la fin 2011. Ainsi le 8 février, un Marocain, Mohamed Echaabi, décrit comme présentant un profil "quasi-identique" à celui de Mohamed Merah, avait été arrêté en Espagne. Il s'agissait, selon les autorités, d'un homme qui s'était "autoradicalisé sur internet" et avait l'intention de "commettre des actes terroristes". Le précédent coup de filet contre Al-Qaïda en Espagne remonte au 2 août 2012, avec l'arrestation dans la région de Cadix, dans le sud, de trois membres présumés du réseau islamiste, deux Tchétchènes et un Turc, soupçonnés d'avoir préparé un attentat en Espagne ou ailleurs en Europe.