Au centre de ce qui semble être une vaste conspiration, apparaît l'Algérien Khaled Abou Bassir,un des référents doctrinaux du Groupe salafiste. Quatre Algériens présumés proches du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (Gspc) algérien, lié à Al Qaîda, ont été placés en détention provisoire en Espagne pour «collaboration avec une organisation terroriste», annonce une source judiciaire madrilène. Ce coup de filet intervient quelques jours seulement après l'arrestation de sept autres islamistes algériens, dont la majorité a été remise en liberté sous contrôle judiciaire, a ajouté la même source. Les onze hommes avaient été interpellés le 23 novembre dans la province d'Alicante (est), à Grenade (sud) et à Murcie (est). Les quatre hommes placés en prison sont Khaled Bakel, Saïd Bouchema, Sadim Zerbouti et Lyès Sihamda. Le juge d'instruction madrilène Fernando Andreu soupçonne le groupe d'avoir prêté un appui financier et logistique au Gspc, et d'avoir tenté d'acquérir à Grenade, en échange de haschisch, de la dynamite Goma-2, la même que celle utilisée par les auteurs des attentats du 11 mars 2004 à Madrid. Le 24 novembre dernier, 17 islamistes ont été arrêtés au Maroc, et d'après les aveux faits à la police antiterroriste par l'un d'eux, ils étaient affiliés au groupe algérien le Gspc, devenu vraisemblablement le fer de lance du jihad au Maghreb et dans les pays du Sahel. Leur objectif était de faire du Maghreb une rampe de lancement vers l'Europe. D'après le journal marocain L'Opinion, ces aveux faisaient état d'un «projet visant à étendre les activités d'Al Qaïda» dans les autres pays du Maghreb, et que cela avait été élaboré depuis la Belgique par l'islamiste algérien Khalid Abou Bassir. Considéré comme un des chefs d'Al Qaîda en Europe, ce dernier en a confié l'exécution à trois adjoints arrêtés à la mi-novembre au Maroc. Il s'agit de deux Belges d'origine marocaine, Mohamed Reha, 18 ans, son oncle Ahmed Zemmouri, 25 ans, et Khalid Azzig, un chômeur de 24 ans, qui a fait un séjour en Syrie et en Turquie comme les deux autres. «Non seulement, nous préparions des opérations jihadistes au Maroc mais nous travaillions pour élargir le mouvement jihadiste à tous les pays maghrébins avec l'aide de nos frères algériens du Gspc», a dit Mohamed Reha à la police, en rappelant que ce mouvement armé présent dans le Sahara algérien a déjà fait acte d'allégeance à Al Qaîda d'Oussama Ben Laden. L'Opinion précise que les 17 islamistes ont en moyenne entre 18 et 25 ans. Ils sont pour la plupart chômeurs, issus de familles modestes et leur niveau d'instruction ne dépasse pas celui du collège. Ils sont originaires de Casablanca -où les cinq attentats du 16 mai 2003 avaient fait 33 morts- Tanger (nord) et Agadir (sud). Certains d'entre eux ont affirmé à la police avoir résidé en Syrie et participé depuis ce pays à l'infiltration en Irak de combattants marocains et tunisiens au profit de la branche irakienne d'Al Qaïda d'Abou Moussab Al-Zarqaoui. Bien qu'ils étaient à la recherche de fonds, les 17 islamistes, selon la police, étaient convaincus que ce n'était qu'une simple question de temps. «Des frères en Espagne étaient disposés à nous envoyer de l'argent et la première étape était le recrutement de jeunes», a affirmé Mohamed Reha, cité par la police. Le prévenu, considéré comme l'un des «cerveaux de la cellule terroriste», a indiqué à la police avoir évoqué avec son oncle islamiste Ahmed Zemmouri, la nécessité «de créer une organisation secrète». Ahmed Zemmouri a déclaré à la police qu'il préparait un voyage en Algérie pour établir des «contacts avec le Gspc», «recruter» des éléments et former d'autres jeunes. Son neveu Reha confirme, indiquant que «nos frères du Gspc» devaient «s'occuper de la formation de recrues marocaines». Khalid Abou Bassir aurait fait part aussi à Reha de son projet de créer un «mouvement jihadiste pour le Maghreb arabe sous la direction d'Al Qaîda avec une organisation unique pour le Maroc et l'Algérie». Après que le Gspc eut fait acte d'allégeance à Al-Qaîda, nous avons décidé, aurait-il déclaré à la police, d'appeler notre mouvement: «organisation Al-Qaîda dans les pays du Maghreb arabe». Selon la police, Mohamed Reha a également déclaré, lors de son interrogatoire, que des jeunes étaient en cours de recrutement en vue de les envoyer en Algérie pour «s'entraîner au maniement des armes et à la fabrication d'explosifs» et qu'il s'agissait là d'une «première étape» dans «le projet de jihad au Maroc et dans la région». Selon les déclarations qu'il a faites à la police, continue L'Opinion, des Marocains et des Algériens, proches d'Al Qaîda, devaient «commettre des attentats contre les intérêts américains et juifs au Maroc, notamment à Tanger (nord) et Essaouira (sud-ouest)». «Des attaques étaient programmées contre des hôtels particulièrement à Essaouira (sud-ouest) où affluent de nombreux touristes juifs, et à Agadir, ainsi que contre le casino de Tanger et le Parlement à Rabat», selon la même source qui évoque aussi des navires «transportant des Américains». Selon un décompte établi sur la base des articles des médias étrangers, au moins une cinquantaine de membres du Gspc ont été arrêtés à travers l'Europe, notamment en Espagne, en Italie, et en France, où le démantèlement de cellules du Gspc avait alimenté les pires craintes et incité Nicolas Sarkozy à prendre des mesures extrêmes pour parer à toute éventualité. Amplifiée à juste raison, ou a tort, la menace du Gspc nourrit les appréhensions, pousse l'UE à légiférer de véritables lois martiales et Washington à mettre sous la loupe la vaste région du Sahel, où les alliances contractées par le Gspc avec les islamistes maliens, mauritaniens et nigériens fait passer des nuits blanches aux responsables locaux de sécurité intérieure.