Adepte des phrases chocs et des polémiques, José Mourinho, désormais ex-entraîneur du Real Madrid, est sans doute aussi célèbre pour son sens de la provocation que pour son palmarès quasiment sans équivalent pour un entraîneur. "Client" idéal des médias, qui l'adulent ou le détestent, cet ancien joueur obscur auto-baptisé "Special One" dès son arrivée à Chelsea, est le seul entraîneur aussi célèbre, voire plus, que les stars qu'il entraîne, au point de décrocher comme eux de très lucratifs contrats publicitaires. Adepte de la provocation -il traite par exemple Arsène Wenger (l'entraîneur d'Arsenal, ndlr) de "voyeur" et se demande innocemment "comment se dit +tricher+ en catalan", une pique à l'adresse du Barça-, l'arrogant technicien portugais, 50 ans, a toujours su répondre aux critiques par ses résultats. "Les doutes me motivent ou me font rire", disait-il ainsi en 2010, au début de son séjour madrilène. Trois ans plus tard, celui qui ne répugne pas à parler de lui à la troisième personne part cependant sur un échec relatif, pour la première fois de sa carrière. Fils spirituel de Ferguson Sa mission était claire: offrir au Real sa dixième C1 (Coupe d'Europe des clubs champions et Ligue des champions). Mais en trois saisons, il n'a décroché qu'un titre de champion d'Espagne et une Coupe du Roi. Une claque pour celui qui rêvait d'être le premier entraîneur à remporter la Coupe "aux grandes oreilles" avec trois clubs différents, après le FC Porto et l'Inter Milan. Jusqu'ici, José Maria dos Santos Felix Mourinho, alias "Mou", avait pourtant réussi un parcours sans faute. Joueur médiocre -cinq buts en cinq ans de carrière au Portugal sous les couleurs de Rio Ave, Belenenses et Sesimbra- ce véritable self-made-man du football s'est patiemment forgé un CV d'entraîneur presque sans égal. Si ce n'est celui de Sir Alex Ferguson, le "boss" de Manchester United pendant 26 ans, selon qui le Portugais "pourrait diriger n'importe quelle équipe". Marié, père de deux enfants, Mourinho a d'abord débuté sa carrière sur le banc comme traducteur et adjoint de l'Anglais Bobby Robson, au Sporting Portugal, au FC Porto puis au Barça. Après le licenciement de Robson par les dirigeants catalans, il reste dans les murs du Barça, toujours comme adjoint, dans l'ombre du Néerlandais Louis van Gaal. Puis c'est le début comme entraîneur +titulaire+, au Benfica Lisbonne en 2000, puis à l'Uniao Leiria, en 2001-2002. Et très vite c'est la gloire, au FC Porto, avec deux titres de champion du Portugal (2003, 2004), et surtout deux Coupes d'Europe, la Coupe de l'UEFA d'abord (2003), puis la Ligue des champions (2004). Second "après Dieu" à Porto, "Mou" décide alors de partir pour Londres et les Blues de Chelsea: "Dans ma carrière, j'essaie toujours d'accepter des défis difficiles", expliquera-t-il. Double champion d'Angleterre avec Chelsea (2005, 2006), il part ensuite vers l'Italie, pour remporter sa deuxième Ligue des champions avec l'Inter Milan, qu'il porte sur le toit de l'Europe, 45 ans après son dernier titre continental, en 2010. Tempérament de navigateur portugais Amateur de beaux costumes, le Portugais au regard ombrageux et aux cheveux poivre et sel devient dès lors une sorte de "golden boy" du ballon rond. Son image glamour et sa réputation de faiseur de miracles font succomber le président du Real, Florentino Perez, qui paie 8 millions d'euros à l'Inter pour racheter son contrat et le faire venir à Madrid. Mais à Santiago Bernabeu, le narcissisme d'un entraîneur plus préoccupé par lui que par un club à l'histoire centenaire passe mal et "Mou" entre en conflit avec la presse, et même avec ses propres joueurs. Le Portugais, qui arrivait précédé de sa réputation de coach fin psychologue, quitte la capitale espagnole en s'étant mis à dos une bonne partie du vestiaire. Fier et bouillonnant dans la victoire -tout Barcelone se souvient encore de sa course effrénée sur la pelouse du Camp Nou après l'élimination du Barça par l'Inter en demi-finale de la Ligue des champions 2010- le Portugais est apparu vindicatif dans la défaite et soucieux de se dépeindre en "mal-aimé". Battant dans l'âme, on peut toutefois compter sur cet homme au tempérament de navigateur portugais -comme il s'était lui-même décrit- pour remettre le cap sur d'autres défis. Avec sans doute un nouveau départ vers l'Angleterre, et Chelsea.