Une finale rêvée Brésil-Espagne. Des manifestants déterminés à disputer la leur dans la rue. La Coupe des Confédérations de football au Brésil, marquée par une explosion de mécontentement social aussi historique qu'inattendue, se dénoue sous haute tension à Rio de Janeiro. Les protestataires brésiliens ont appelé sur les réseaux sociaux à manifester massivement et pacifiquement dès 10H00 (13H00 GMT) en direction du mythique stade Maracana, temple du football brésilien. Plus de 11.000 policiers vont cadenasser les abords du stade dans un périmètre de trois kilomètres, pour garantir la sécurité des 78.000 spectateurs de ce tournoi conçu comme une répétition générale du Mondial dans un an au "pays du roi Pelé". La police, souvent critiquée pour ses méthodes brutales, a invité des représentants de l'Ordre des avocats du Brésil (OAB) à envoyer ses observateurs pour veiller au bon déroulement du maintien de l'ordre. "Demain, c'est le grand jour. Nous pourrons mesurer l'envergure des manifestations", écrivait samedi un internaute sur la page Facebook du mouvement libertaire Anonymous de Rio. Des dizaines d'internautes appelaient les sympathisants de la fronde sociale qui ébranle le géant d'Amérique latine depuis plus de deux semaines à surmonter leur peur d'éventuels affrontements avec la police et à protester pacifiquement. La présidente de gauche Dilma Rousseff, sifflée par le public lors du match d'ouverture à Brasilia au côté du président de la Fifa Joseph Blatter, n'a pas prévu d'assister à la finale qui se jouera devant les 78.000 spectateurs du Maracana. Plus d'un million de Brésiliens étaient descendus dans les rues le 20 juin, lors des plus grandes manifestations jamais vues dans le pays pour dénoncer l'indigence des services publics de base, la corruption de la classe politique et les sommes colossales investies pour l'organisation du Mondial en 2014. Le mouvement, totalement inattendu, était parti d'une fronde limitée contre la hausse du prix des transports en commun. Il s'est ensuite répandu comme un traînée de poudre à travers tout le pays, prenant de cours les autorités et la Fifa, accusée à son corps défendant par les protestataires d'imposer les dictats du foot-business au pays. Autorités, médias brésiliens: personne ne s'est risqué au petit jeu des pronostics sur l'amplitude de la mobilisation de dimanche. Les manifestations animées sur les réseaux sociaux par des jeunes brésiliens de la classe moyenne, toujours nombreuses, ont baissé d'intensité ces derniers jours. Mais c'est à Rio que les plus massives ont eu lieu (300.000 personnes le 20 juin) et qu'elles ont le plus gravement dégénéré en violences, pillages et scènes de guérilla urbaine. Stades livrés en retard, aéroports obsolètes, sécurité, prix exorbitants des hôtels: les inquiétudes initiales sur l'organisation de la Coupe des confédérations ont été balayées par le vent de contestation qui souffle sur le pays. La Fifa rêvait d'organiser la plus belle des coupes du Monde au pays du roi Pelé. Le gouvernement d'en faire la vitrine du rayonnement d'un Brésil émergent, économiquement conquérant, socialement avancé. Mais la vague de mécontentement, soutenue par 75% de la population de ce pays de 194 millions d'habitants, promet de perturber durablement cet agenda idyllique. Déjà confrontée au net ralentissement de l'économie brésilienne et à une poussée inflationniste, Dilma Rousseff sort politiquement fragilisée de ces deux semaines de "printemps brésilien". Selon un sondage publié samedi, elle a perdu 27 points de popularité en deux semaines, passant de 57% d'approbation à 30%. Elle demeure favorite de l'élection présidentielle de l'automne 2014, mais devra affronter un second tour si la tendance se maintient. Le Mondial-2014 se déroulera en pleine campagne électorale.