Catherine Ashton, porte-parole de la diplomatie de l'Union européenne (UE), a pressé lundi les autorités égyptiennes de dialoguer avec les Frères musulmans après la mort de 80 membres de la confrérie tués par les forces de sécurité au cours d'affrontements au début du week-end au Caire. Les Frères musulmans, dont est issu l'ancien président Mohamed Morsi, destitué par l'armée le 3 juillet, ont pour le moment renoncé à marcher sur le siège des renseignements militaires égyptiens au Caire, comme ils l'avaient initialement annoncé. Ils ont prévenu qu'ils manifesteraient de nouveau dans la soirée dans cette direction. Catherine Ashton est la première responsable occidentale de haut niveau à se rendre en Egypte depuis les affrontements du week-end. La diplomate a rencontré le chef de l'armée et ministre de la Défense, le général Abdel Fattah al Sissi, qui a piloté la destitution de Mohamed Morsi, le vice-président par intérim Mohamed ElBaradeï et le ministre des Affaires étrangères par intérim, Nabil Fahmy. Avant ces rencontres, sur lesquelles aucun détail n'a été officiellement donné dans l'immédiat, Catherine Ashton a précisé qu'elle demanderait la mise en œuvre d'un "processus de transition totalement ouvert, intégrant tous les partis politiques, y compris les Frères musulmans". Mohamed ElBaradeï, cité par l'agence officielle Mena, a dit avoir déclaré à la diplomate européenne que les autorités égyptiennes faisaient tout ce qui était en leur pouvoir pour "trouver une issue positive à la crise actuelle, afin de ne faire couler le sang d'aucun Egyptien". Catherine Ashton doit également rencontrer des cadres du Parti de la liberté et de la justice (PLJ), émanation politique des Frères musulmans. Même si l'UE est le premier donateur en matière d'aide civile à l'Egypte, elle est dans l'ensemble un partenaire moins important pour le Caire que les Etats-Unis, qui fournissent entre 1,5 et 1,6 milliard de dollars d'aide annuelle, dont 1,3 au titre de l'assistance militaire. AVERTISSEMENT DE L'ARMEE Lundi, un cortège de plusieurs milliers de partisans de Mohamed Morsi est parti de la mosquée Rabaa al Adaouia, dans le nord-est du Caire, où des sympathisants des Frères musulmans observent un sit-in de protestation depuis la destitution de l'ancien président. C'est près de ce lieu de rassemblement que 80 personnes ont été tuées samedi à l'aube, selon des chiffres du ministère de la Santé, qui a révisé à la hausse le bilan précédent de 72 victimes. Les manifestants de lundi ont finalement rebroussé chemin, après une mise en garde de l'armée leur enjoignant de rester à l'écart des "sites militaires en général et du siège des renseignements militaires en particulier" La police a par ailleurs arrêté lundi matin deux personnalités du parti Ouassat, une formation islamiste orientée au centre et alliée de Mohamed Morsi. Le général Sissi, qui a été nommé par Mohamed Morsi avant de se retourner contre lui, a fait dimanche sa première apparition publique depuis les affrontements de samedi, souriant devant les caméras de télévision lors d'une cérémonie de remise de diplômes pour les nouvelles recrues de la police. L'armée assure ne pas vouloir garder le pouvoir et rendre les pleins pouvoirs aux civils à l'issue d'élections parlementaires dans un délai d'environ six mois. La mise en avant du général Sissi, qui apparaît fréquemment dans les médias publics et privés, a cependant jeté le doute sur les intentions des militaires, au pouvoir pendant de longues années, y compris pendant la période transitoire qui a suivi la chute d'Hosni Moubarak en février 2011, jusqu'à l'élection de Mohamed Morsi il y a un an.