La 4e soirée des Mondiaux d'athlétisme a été la plus accomplie et la plus folle depuis le début de la compétition avec la victoire devant une foule venue pour elle de la perchiste Yelena Isinbayeva et la +perf+ sur 400 m de l'Américain LaShwan Merritt (43.74), mardi à Moscou. Et dans un spectacle haut de gamme, les Français n'ont pu complètement exprimer leur talent. Le jeune (21 ans) Pierre-Ambroise Bosse, volontaire mais encore tendre, a dû renoncer à son rêve de podium sur 800 m à 200 m de l'arrivée, 7e au final en 1 min 44 sec 79. Pour sa part, Antoinette Nana Djimou, championne d'Europe, a payé au prix fort ses limites sur le double tour de piste pour rétrograder à la 8e place de l'heptathlon (6326 points). Le stade Luzhniki, enfin bien rempli, a donc constitué le cadre idéal pour célébrer la tsarine en quête d'un 3e succès aux Mondiaux, après ceux de 2005 et 2007. "La foule ce soir est la meilleure que j'ai jamais vue. C'est ma maison, c'est comme si j'étais chez moi", a d'ailleurs reconnu la Tsarine. Restée seule au monde, après avoir réussi 4,89 m au premier essai, la championne de Volgograd a demandé à ce qu'on lui dépose la barre à 5,07 m. Elle fut tout près de réussir à sa deuxième tentative sous une envolée de +Yelena, Yelena+, ce qui aurait constitué le 19e record du monde de sa carrière. Merritt impressionnant Des larmes et des mots étranglés, puis des cris hystériques déchirant le stade vidé de ses supporteurs. Isinbayeva, telle une diva et ses fluides, a accompli le retour rêvé. Elle n'avait plus conquis le titre majeur en plein air depuis les Jeux de Pékin, en 2008. "Je stoppe pour avoir un enfant l'année prochaine et j'essaierai de revenir pour les jeux de Rio, si tout va bien. Mais si ça se passe mal, je prendrai ma retraite. Donc, ça veut dire une année et neuf mois, et mon retour juste pour Rio", a ajouté la Russe. Merritt impressionnant C'est injuste mais cette renaissance a éclipsé les autres belles choses qui ont donné du premier sport olympique une image avantageuse, par sa diversité notamment. Alors qu'Isinbayeva fêtait le succès assuré -aux dépens de l'Américaine Jennifer Suhr et de la Cubaine Yarisley- en piquant un sprint vers les tribunes, l'US Team répondait avec un Merritt ravageur sur 400 m. En 44 sec 74, il établissait le meilleur chrono depuis sa victoire en finale des J0-2008 (44.75). Encore champion du monde en 2009, l'Américain allait connaître une traversée du désert, suspendu 21 mois pour dopage au DHEA (stéroïde anabolisant). Pour sa défense, le costaud de Portsmouth (Virginie) avait expliqué que le produit était destiné à augmenter la taille de son pénis. "J'avais faim, probablement le concurrent le plus affamé du lot. Je crevais même de faim. Et c'est pourquoi je n'étais pas plus fatigué que ça malgré le chrono", a expliqué Merritt. Qui a en tout cas croqué tout cru le prodige (20 ans) grenadin Kirani James (44.99), son successeur aux titres mondial et olympique, probablement victime d'un problème musculaire. Première éthiopienne Déjà en or aux Mondiaux en salle d'Istanbul-2012, Mohammed Aman a offert à l'Ethiopie un premier grand titre en plein air sur 800 m, le jour même où le Kenya, privé de son roi David Rudisha, ne présentait aucun candidat à sa succession. Aman a ajusté à 50 m de l'arrivée l'Américain Nick Symmonds, piloté par son compatriote Duane Solomon. "J'étais confiant sur mon sprint terminal", a expliqué le vainqueur, seulement 19 ans, qui avait échoué aux Jeux de Londres (6e). Au disque, Robert Hartning a ajouté un 3e titre consécutif à son palmarès, sous les yeux inquiets de sa femme. "Je suis bien parti pour entrer dans l'histoire de ma discipline", a remarqué l'Allemand. La gloire a enfin embrassé l'heptathlète ukrainienne Hanna Melnychenko, 30 ans, après avoir souri en matinée à la marcheuse russe Elena Lashmonova, 21 ans seulement et déjà championne olympique. Dans une farandole de gestes et d'attitudes, tous ces champions sont redevenus petits enfant au moment de l'offrande. Aman et le Djboutien Ayanleh Souleiman, magnifique troisième du 800 m, s'en remettent à Dieu en s'inclinant sur la piste. Comme un porte-bonheur, Hartning déchire son maillot. Et puis, il y a les heptathloniennes qui se soumettent au rituel de la photo de groupe. Et, à l'issue du 800 m, les plus fraîches aident leurs adversaires effondrées à se relever de leur dernière "fatigue".