La nouvelle ordonnance représente un véritable coup de pied dans la fourmilière des barons des containers. Le Conseil de gouvernement, réuni dimanche sous la présidence de Ali Benflis, a adopté une ordonnance jugée par tous «de la plus haute importance». Celle-ci porte sur «la répression des infractions à la législation et à la réglementation des changes et des mouvements de capitaux de et vers l'étranger». Elle complète et modifie une précédente ordonnance, datée de juillet 96. L'ensemble des observateurs de la scène économique et politique nationale a estimé hier, sur la base du document dont nous avons pu prendre connaissance, que cette mesure vise en premier lieu «à préserver l'économie nationale de la fuite des capitaux, des transactions d'import-import anarchiques menées par le tout-venant sous la protection de quelques gros barons». La mesure, donc, est une suite logique, quoique quelque peu tardive, du constat déjà fait maintes fois par le chef de l'Etat, notamment lors du forum de Crans-Montana en Suisse, qui affirmait qu'«une poignée de personnes, une quinzaine environ, s'est enrichie en toute légalité à l'ombre de certaines lois préexistantes». L'une d'entre elles, la plus importante sans doute, était l'ordonnance 96-22 du mois de juillet 96. Elle a, en effet, permis à de nombreux importateurs de transférer des fonds, d'amasser de véritables fortunes planquées à l'étranger, sous le couvert de lignes de crédits destinées à des importations où les sous-facturations le disputaient aux diverses évasions fiscales. Dans le même temps, la nouvelle ordonnance, devant être signée par le chef de l'Etat dans les prochains jours avant d'entrer en vigueur, cherche à exercer «un meilleur contrôle sur les activités des banques, sans pour autant les gêner dans leurs transactions, lorsque celles-ci ne sont entachées d'aucune irrégularité notable». L'imminence de l'entrée en vigueur de cette ordonnance, notamment, pourrait expliquer les rumeurs qui avaient circulé à propos d'El Khalifa Bank et qui, en fait, avait concerné pas mal d'organismes financiers dans le cadre de la mise en place de ces nouvelles mesures. Celles-ci cherchent à mettre en place «une meilleure complémentarité et synergie entre les différents intervenants dans les opérations de contrôle des changes». Outre les banques, des ministères comme ceux de l'Intérieur, des Finances, du Commerce, de la Coordination des réformes et de l'Industrie sont concernés au plus haut point. S'agissant des organismes, outre les banques, les différents services de sécurité, l'IGF, le Trésor, la DCP et les Douanes devront tous travailler dans une meilleure symbiose puisque les fraudes le plus souvent, indiquent des sources, se font «à cause du manque de coordination entre les différents services concernés par le contrôle doublé d'une complicité dans un ou plusieurs de ces mêmes services». Afin de couper court à toute velléité de critiquer ce texte sous prétexte qu'il pourrait ralentir les flux commerciaux au moment où l'économie de marché commande l'inverse mesure, l'ordonnance a mis au point un nombre important de mesures, rendues possibles par les impressionnantes avancées technologiques pour «faciliter et accélérer les conditions d'octroi et d'exercice de ce genre de transactions».