L'on s'active au niveau de la Ligue arabe à réunir les conditions pour la tenue d'un sommet arabe. Encore une fois, les Arabes, trop divisés pour parler d'une seule voix, semblent contraints de prendre le train en marche pour ne point reconnaître leur impuissance à peser sur les événements qui se préparent dans leur région où ils ne seront que de simples figurants, alors même qu'ils sont les tout premiers concernés par une éventuelle guerre contre l'Irak. Au moment où la situation prévalant dans les régions du Golfe et du Proche-Orient imposait, à tout le moins, la convocation en urgence d'un sommet arabe extraordinaire, on s'est, a contrario, attaché à enlever toute caractéristique d'urgence à ce sommet par le choix d'avancer le Sommet ordinaire de quelques semaines et de le transférer de Bahreïn au Caire. Il est, dès lors, vraisemblable que le sommet arabe prévu normalement dans la capitale bahreïnie pour le 24 mars ait lieu au Caire, - selon des indications en provenance de la capitale égyptienne -, le 1er ou le 2 mars. Or, il se précise de plus en plus que les Américains pourraient prendre l'initiative d'ouvrir les hostilités dès la fin du mois en cours. Dès lors quel est l'intérêt de réunir ce sommet des souverains et chefs d'Etat arabes si l'ont conçoit que la cause est bel et bien entendue? De fait, de même que Manama soit trop impliquée dans les préparatifs guerriers américains, - Bahreïn accueille, outre une partie de l'armada navale américaine, des milliers de soldats US sont regroupés sur son territoire -, beaucoup d'Etats arabes sont, à un niveau ou à un autre, redevables de l'aide -sécuritaire, politique ou militaire - de Washington. Ce qui fait que non seulement l'engagement arabe, contre une guerre en Irak, soit très timide, beaucoup d'entre eux se sont résignés à l'inéluctabilité des frappes américaines contre l'Irak. Ce qui a fait dire au roi de Jordanie, lors du Forum de Davos, qu'il était désormais «trop tard pour une solution diplomatique». De la même manière, le secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa, faisait état, mardi, devant la presse, de son «extrême pessimisme», ce qui lui fait affirmer qu' «Il faut absolument que le sommet arabe se tienne, n'importe où, en raison de l'importance d'une décision arabe commune face à la grave situation que traverse la région, que ce soit en Palestine ou en Irak». Certes! Mais pour prendre quelle décision lorsque l'on sait que des Etats arabes (Koweït, Bahreïn et Qatar notamment) hébergent d'ores et déjà une grande partie de l'armada américaine, que d'autres (à l'instar de l'Arabie Saoudite, l'Egypte ou la Jordanie) sont liés aux Etats-Unis par des liens particuliers de coopération et d'assistance? Ce qui met ces pays, tous frontaliers de l'Irak, en porte-à-faux par rapport aux événements en cours. Le fait même du transfert du sommet arabe ordinaire de Bahreïn au Caire est déjà un signe en soi et témoigne de l'embarras des dirigeants arabes. Aussi, de là à attendre un «signal fort» en direction de Washington, de la part des Arabes, comme le réclame avec insistance Bagdad, il faut avouer qu'il est un peu tard pour ce faire. Et à défaut d'avoir les moyens (politiques et diplomatiques) d'arrêter la machine de guerre américaine, un sommet arabe aura, au mieux, à constater l'impuissance récurrente des pays arabes.