Réunis dans un contexte international défavorable, les Non-alignés réitèrent la primauté de l'ONU. La crise irakienne, la tendance impériale des Etats-Unis, la marginalisation accentuée des pays en voie de développement, qui sont aussi l'ossature du non-alignement, sont autant des thèmes qui interpellent un mouvement qui doit, outre de faire sa mue, s'adapter à la nouvelle donne internationale, sous peine de se voir tenir en marge de la construction de l'environnement mondial du XXIe siècle. Les déclarations des principaux dirigeants des pays membres du mouvement indiquent bien que ceux-ci sont aujourd'hui conscients du danger de l'unilatéralisme américain contre lequel ils s'élèvent sans concession. Unanimes les membres du mouvement estiment que les décisions de la sauvegarde de la paix et le maintien de la sécurité demeurent du ressort exclusif de l'ONU et du Conseil de sécurité, déniant, en fait, l'ambition de la première puissance mondiale de se substituer à l'organisation internationale, singulièrement pour ce qui est de la paix et de la sécurité dans le monde. Le mouvement des non-alignés, qui réunit son sommet dans une conjoncture marquée par les crises irakienne et proche-orientale, la recrudescence du terrorisme international, le creusement des disparités entre les hémisphères Nord et Sud, est, dès lors, appelé à faire son introspection et à situer son action dans les fondements qui font sa raison d'être. En effet, au moment où les idéaux de liberté, de justice, de démocratie et d'équité politique et économique sont battus en brèche par l'hégémonisme des grandes puissances, il appartient au non-alignement de réitérer des principes qui sont sa raison d'être et ont permis et, surtout, donné aux pays en développement, de dire leur mot sur les affaires de notre planète. Aujourd'hui c'est le multilatéralisme autorisant la concertation internationale qui est fortement remis en cause par l'hégémonisme du géant américain prétendant gérer les affaires mondiales dans la seule optique et perspective des intérêts américains. Dès lors, redonner au mouvement toute sa pugnacité constitue l'un des thèmes qui préoccupent au premier degré cette treizième conférence des chefs d'Etat et de gouvernement des pays non-alignés. Résumant la situation, le Président Bouteflika soulignera en effet que «(...) dans un contexte internationale caractérisé autant par la nouvelle configuration des relations internationales que par les mutations rapides et profondes générées par la mondialisation, aux menaces et fractures traditionnelles sont venus s'ajouter de nouveaux défis et de nouveaux périls à caractère global et transfrontalier tels que le terrorisme (...) tandis que s'accentue l'exclusion des plus pauvres et que s'accroît la puissance des plus nantis», relevant: «Cette dégradation dangereuse de la situation internationale ne fait que confirmer la validité et la pertinence de notre mouvement, Elle exige, dans le même temps, que nous redoublions d'efforts et d'imagination pour l'adapter aux nouvelles réalités internationales afin qu'ils jouent plus efficacement son rôle dans le monde». Face à ces menaces qui pèsent sur le monde, le président sortant du non-alignement, le président sud-africain Thabo Mbeki exhorte le mouvement à s'impliquer davantage pour «la démocratisation du système international de gouvernance en déployant tous les efforts en mesure de protéger et de favoriser les principes et les pratiques du multilatéralisme aux tendances à l'unilatéralisme». Le ton est ainsi donné, singulièrement lorsque le Premier ministre malaisien, le Dr.Mohamed Mahathir, nouveau président en exercice, pour trois ans du non-alignement, pointera du doigt les pays occidentaux, particulièrement les Etats-Unis, exprimant le rejet de «la guerre comme moyen de règlement des différends», et appelant «à une action concertée des non-alignés et de leurs alliés du Nord pour l'abolition du massacre des peuples». Le sommet, qui entamait, hier, sa seconde et dernière journée de travail, s'est accordé sur le fait que les Nations unies devaient être, en toute circonstance, le premier et dernier recours pour les résolutions de tout différend ou crise mettant, ou pouvant mettre, en danger la paix et la sécurité dans le monde.