Il y a 41 ans aujourd'hui, l'intellectuel et homme de lettre Mouloud Feraoun, était assassiné «...comme si une giclée de balles imbéciles pouvait l'avoir arraché de notre vie, sous prétexte qu'elle l'avait stupidement rayé du paysage...'' affirmera Mouloud Mammeri suite à la perte tragique de l'une des plus grandes plumes de la littérature algérienne. Une grande perte pour la littérature maghrébine autant que pour la littérature francophone. Un fils du pauvre qui a su décrire la vie de tous les fils des pauvres de d'Algérie à l'époque coloniale. Il percevait l'écriture non pas comme une fin en soi, mais comme le moyen de crier tout haut la souffrance de son peuple. La traduction de la grande majorité de ses oeuvres, dans toutes les langues du monde : russe, italien, espagnol, arabe ou encore allemand n'est que la confirmation, qu'elles sont porteuses d'un message universel et humaniste. Engagé depuis toujours, il se consacrera à ce qui a été appelé «l'action sociale», où il luttera pour le droit à l'instruction, et celui à la liberté. Mais voilà, dans la matinée du 15 mars 1962, à quatre jours de l'entrée en vigueur du cessez-le-feu, il aura rendez-vous avec le terme de sa vie, quand, au château royal de Ben Aknoun, un commando de l'OAS ( organisation armée secrète), débarque pour l'abattre et quelques-uns de ses compagnons, dont Max Marchand. Les tueurs sont des monstres fabriqués directement par la bataille d'Alger où des unités de l'armée ont eu pour consigne d'utiliser tous les moyens contre la «rébellion». «Dans les crimes de guerre, le crime contre l'esprit n'est pas le moindre» soulignaient les nombreux commentateurs qui ont honoré la mémoire de l'écrivain. Ce groupe d'intégristes ultra, de l'«Algérie française» surgit de nulle part, tirant 119 balles sur Feraoun et sur cinq de ses collègues: Max Marchand, Robert Eymart, Marcel Basset, Ali Hamouten et Salah Ould Aoudia, tous inspecteurs des centres sociaux éducatifs. Un programme a été tracé à l'occasion de la commémoration du 41e anniversaire de leur assassinat. Du côté algérien l'organisateur en est «l'association Mouloud Feraoun'', implantée à Tizi Hibel, village natal de l'auteur du «Journal de Kabylie». En France c'est l'association des amis de Max Marchand, Mouloud Feraoun et de leurs compagnons, basée à Ivry, dans la région parisienne qui commémorera cette date de souvenir. Dans ce cadre, un colloque a débuté le 12 mars à Oran, à l'école normale de l'enseignement supérieur (Enset) auquel ont pris part des spécialistes français et aura pour thème ‘'l'enrichissement interculturel entre l'Algérie et la France''. La rencontre a été rehaussée par la présence des fils de Marcel Basset, de Ali Hamouten et de Mouloud Feraoun dont les exposés ont porté sur ‘'la vie et l'oeuvre'' de leur défunt père. A Alger la cérémonie a été marquée hier par un recueillement à la mémoire des défunts au Château Royal de Ben-Aknoun, ensuite les participants ont évoqué au cours d'une rencontre au Palais de la culture Moufdi Zakaria la vie et l'oeuvre de Mouloud Feraoun.