l'agression contre l'Irak avait été conçue comme un film où chaque séquence et chaque plan avaient une place précise... Ce scénario, très hollywoodien, où le guerrier estampillé «US» sort toujours à son avantage, s'est effiloché au fur et à mesure que le terrain imposait sa vérité, que la guerre prenait des proportions que les stratèges, américains n'ont pas prises en compte et, encore moins, pressenties. C'est ainsi que la guerre contre Saddam Hussein se meut peu à peu en guerre contre le peuple irakien. Un peuple qui, loin de répondre aux attentes de ceux qui, dans leur plan d'attaque, l'ont tenu pour quantité négligeable, se révèle un obstacle de plus en plus insurmontable par la farouche résistance patriotique qu'il oppose aux agresseurs. Les néoconservateurs de la Maison-Blanche ont fondé la justification de l'agression de l'Irak par le fait que c'était une guerre «libératrice» contre Saddam Hussein et son régime dictatorial, estimant que le maître de Bagdad, isolé de son peuple et honni par la population, ne tiendrait pas plus de soixante-douze heures après le début de ce qu'ils ont appelé opération «Liberté de l'Irak», que, plus justement, la communauté internationale qualifie de plus en plus d'invasion par une coalition armée étrangère. Les calculs des faucons américains se sont ainsi révélés faux et obsolètes devant la résistance du peuple irakien dans son ensemble. Les bombardements aveugles, par l'aviation américano-britannique, de Bagdad et Bassora, notamment, -où ce sont les civils irakiens qui tombent sous les bombes des coalisés-, indiquent, en fait, le désarroi dans lequel se trouvent ceux qui ont décidé une guerre aux conséquences tragiques, au plan humain, incalculables, au plan géostratégique, Bush et ses conseillers faisant peu cas des avertissements et mises en garde de la communauté internationale. Sûr de lui et de son droit à redresser les torts de notre monde, arrogant devant l'adversité, le président américain, George W.Bush a, consciemment, ouvert la boîte de Pandore. De manière irrationnelle, qui frise la paranoïa, l'Administration Bush estime que tout doit se soumettre aux Etats-Unis, forts de leur puissance démesurée, de leurs gadgets high-tech, qu'ils utilisent généreusement contre un peuple qui n'a que son patriotisme et son courage à leur opposer. Ce qui est singulier, c'est que les médias internationaux ne mettent pas suffisamment en relief la disproportion des moyens que les coalisés ont mis en branle face à un pays diminué, renvoyé au «Moyen Age», comme l'affirmait déjà en 1991, le général Schwarzkopf, chef d'état-major de l'opération Désert Storm (Tempête du désert). Contre un Irak exsangue, les Américano-Britanniques, soutenus par une coalition de 25 pays, (selon le secrétaire d'Etat, Colin Powell), se sont lancés dans ce qui ne peut être appelé qu'une guerre d'agression, un génocide planifié, un crime contre l'humanité. Le bombardement d'Al-Choula, quartier populaire de Bagdad, où plus de 50 personnes ont trouvé la mort, et où on compte des centaines de blessés, est un exemple parmi d'autres, des bavures commises depuis le début de l'offensive, qui caractérisent bien le crime contre l'humanité. La boîte de Pandore de Bush c'est aussi, aujourd'hui, l'inattendue résistance des Irakiens, solidaires, même si cela se fait à contre-courant de leurs dirigeants, y compris un Saddam Hussein, qui retrouve une aura qu'il avait perdue depuis longtemps...Grâce à son ennemi de toujours: George Bush Junior. Un renversement de situation auquel, même dans leurs plus affreux cauchemars, les stratèges de Washington n'avaient rêvé. La guerre qui, au fil des jours, se révèle ni courte ni propre, a occasionné une sorte de désenchantement dans les rangs américains, où l'on se rend compte, un peu tard, qu'ils ont mésusé de leurs forces et des faiblesses, supposées, des Irakiens qui, selon les envahisseurs américano-britanniques, n'attendaient que l'offensive «libératrice». Revenant sur terre, admettant, même si cela se fait à demi-mots, avoir, en matière de stratégie, fait tout faux, le général Richard Myers, numéro deux de l'état-major américain de l'offensive contre l'Irak, a indiqué, hier, à une question de la BBC: «Je dirais que les combats les plus durs sont encore devant nous», admettant ainsi que c'était plus difficile qu'il ne l'avait espéré. Interrogé sur la durée que pourrait prendre la guerre, le général Myers a déclaré: «Je ne ferais pas de pronostic sur la durée du conflit.» Revenant cependant sur des affirmations que la réalité avait balayées affirmant: «La guerre durera suffisamment pour permettre le désarmement de l'Irak ( Hans Blix le chef des inspecteurs de l'ONU, a démenti, hier, le fait que l'Irak dispose encore d'un armement significatif, et s'il y avait quelque chose à trouver, les experts de l'ONU l'aurait certainement fait ) et également la chute d'un régime qui opprime son peuple.» Le général américain, reconnaît toutefois «la ténacité, l'audace, le caractère féroce de ce que nous appelons les commandos de la mort du régime». Le général Myers minimise, ainsi, et nie dans le même temps, la résistance de tout un peuple à l'agression des coalisés américano-britanniques, comme si ces «commandos», quelle que soit leur pugnacité, pouvaient stopper et retarder, à eux seuls, l'avancée de l'armada coalisée et des troupes d'invasion. Aveugles, ne voyant pas, ou ne voulant pas voir, ce qui met en porte à faux la légitimité de leurs actions en Irak, les Américains prétendent libérer l'Irak contre le vouloir même du peuple irakien. Après une semaine, la guerre a changé de nature et, aujourd'hui, les marines américains et les parachutistes britanniques ne font plus de distinction, faisant la guerre à l'ensemble de la population irakienne, tuant tous ce qui ne porte pas l'uniforme de la coalition, comme en témoignent les milliers de civils déjà tombés sous les bombes américano-britanniques.