Il faut avoir une bonne dose de naïveté et de spontanéité pour réagir comme je l´ai fait à l´annonce des propositions du président du FCE. Ayant reçu l´information brute, sortie tout droit des voies hertziennes, j´ai commis l´imprudence de la gober sans chercher à en savoir plus. C´est le pêché mignon de ceux qui, échaudés par des décennies de mises en scène, croient toujours qu´il y a anguille sous roche à la moindre initiative politique originale, d´où qu´elle sorte. Je bats ma coulpe et avoue humblement que je me suis trompé d´idée et d´adresse, et que les scénaristes et dialoguistes de la République me le pardonnent (enfin certains d´entre-eux seulement). J´étais, comme on dit, à côté de la plaque, à côté de mes pompes. Le président du FCE n´a pas fait des propositions dans l´intérêt de la main-d´oeuvre, mais seulement dans l´intérêt de la corporation qu´il représente: les chefs d´entreprise. Et c´est là aussi qu´il faut regarder de près les solutions qu´il préconise pour sortir de la crise économique que traverse le pays, malgré un formidable matelas de devises. Sans être économiste, et sans avoir suivi les cours du soir qu´a donnés M.Raymond Barre pendant la tragédie nationale, à Alger, aux libéraux en herbe et aux dents longues et pointues, il est bon de savoir que dans une économie libérale, c´est la loi de l´offre et de la demande qui détermine, entre autres, les prix des produits de consommation. Il est bon de savoir aussi que tous les Etats interviennent d´une manière ou d´une autre pour réguler le flux des produits et de la monnaie. Des institutions, des mécanismes ont été créés ou mis au point pour éviter à la société les spéculations ou les blocages qui mènent à la crise. Or, que propose, entres autres, M.Hamiani si ce n´est une réévaluation du dinar, qui serait une prime directe versée aux importateurs de tout poil: qu´ils importent de la poudre de lait, de la poudre aux yeux, de la semence de pomme de terre ou des produits taiwan. Les exportations hors hydrocarbures ne pèsent pas lourd dans la balance commerciale, la réévaluation du dinar ne les pénaliserait point. Cependant, elle permettra aux importateurs de matières premières, de produits semi-finis ou de produits finis d´importer plus avec moins de dinars. Or, la réévaluation d´une monnaie ne peut se faire que conséquemment à l´augmentation de la production et de la productivité. Peut-on considérer la rente pétrolière comme cause possible d´une réévaluation du dinar? Ce serait hasardeux de le penser quand on connaît le système du yo-yo, auquel est soumis ce produit stratégique qu´est le pétrole. D´autre part, tout le monde sait que les chefs d´entreprise ne sont pas tous animés de sentiments philanthropiques et que l´abbé Pierre n´est pas sorti du patronat; il n´y a qu´à voir la qualité d´une bonne partie de la pomme de terre qui est livrée sur les étals: à moitié pourrie. Parce que les entrepôts frigorifiques, ont proliféré et qu´ils échappent à tout contrôle et que la législation, à cet égard, est assez permissive puisque le phénomène dure. L´absence d´organismes d´Etat ajoute à cette anarchie du marché qui ne profite qu´aux spéculateurs. En outre, il faut se souvenir que quand un produit augmente de prix, il ne redescend jamais au prix national quelles que soient les mesures prises. Il faut rappeler que le but de chaque entrepreneur est d´accroître ses profits. Il faut rappeler que même du temps du socialisme spécifique, les organismes régulateurs ne jouaient pas le jeu, pendant que des montagnes de pommes de terre pourrissaient à Mascara, les Algérois faisaient la queue aux Souks El Fellah en attendant que l´Ofla en importe de Marseille. Conclusion: la subvention demeure toujours une demi-mesure face à l´iniquité de la rente pétrolière. Mais, aussi un encouragement au trafic continuel qui sévit aux frontières perméables. Entre deux maux, il faut choisir le moindre. Celui qui garantit la paix sociale. [email protected]