Une maman détient ses petits et refuse de... La cour d´Alger, à l´instar des grandes cours du pays, détient un record absolu d´histoires de familles, de voisinage, d´outrage de fonctionnaires dans l´exercice de leurs fonctions et autres agressions lors de vols à l´arraché. Pour la seconde fois en quinze jours, Maître Abdelaziz Djedaâ, l´avocat de deux vieillards à qui on refuse le droit de visite des enfants orphelins depuis la mort de leur père dont la veuve ne veut rien savoir. Elle refuse systématiquement de permettre aux grands-parents de serrer leurs petits-enfants, histoire de se rappeler ce fils disparu prématurément. Et plus que le pire - si vous permettez l´expression, la maman aurait très mal accueilli les vieux - lesquels se sont même plaints de coups et blessures donnés par la veuve. Evidemment, sans témoin, les magistrats et même le procureur général de l´audience ne sont pas tenus de retenir de si graves accusations de violences à l´encontre de deux membres de la belle-famille. Ce qui est par contre sûr, ce sont les termes de l´article 327 du Code pénal, qui dispose que «quiconque étant chargé de la garde d´un enfant, ne le représente point aux personnes qui ont le droit de le réclamer, est puni d´un emprisonnement de deux à cinq ans». Ces termes sont des mots. Ils représentent la loi. Mais dans notre pays, le sentiment prime sur le texte comme chez les Amazighs, le lait prime sur le...sang, vu que c´est une société matriarcale! Malgré l´absence de la prévenue à la barre ce qui constitue en soi un outrage à la justice -Passons- les débats ont été très serrés. Latifa Kessenti, a certes, sous les yeux les attendus de la juge de Hussein Dey mais elle veut piocher et mesurer probablement le degré de dramatisation du dossier. La vieille victime va sortir des énormités sur le traitement ignoble qui lui avait été réservé ainsi qu´à sa moitié. Plaintes, larmes, sanglots, regrets, silences lourds se succèdent à la barre dans un silence de mosquée à la prière du dhor en été et au sud du pays. Ce qui va pousser Maître Djedaâ à enfourcher un étalon noir et aller, sabre au clair, contre le délit de non-représentation d´enfants. Il lance, les yeux mi-clos: «Vous aurez constaté, madame la présidente, mesdames les conseillères que notre société vit des moments d´amnésie, condamnables. Voilà une maman qui refuse de remettre ses enfants à leurs grands-parents qui ont le droit et le devoir d´avoir auprès d´eux leurs petits-enfants, de temps à autre et à longueur d´année pour l´équilibre de tous, les enfants en premier!», s´écrie le procureur général qui va s´étaler sur les méfaits de ceux qui veulent mépriser autrui. «Oui, on peut mépriser des individus, mais jamais on ne doit ni tourner le dos à la loi, ni pire encore, la piétiner», a encore articulé Farek qui va s´appuyer précisément sur cette même loi pour requérir l´aggravation de la peine prononcée par le tribunal de Hussein-Dey. Deux mois de prison avec sursis, cinq mille dinars d´amende et vingt millions de centimes de dommages et intérêts. Lui succédant, Maître Abdelaziz Djedaâ, s´était avancé à la barre, compléter le réquisitoire de Mohamed Farek, le représentant du ministère public. Il avouera son dépit devant de tels comportements en tournant la tête vers le banc réservé aux avocats où est assise sagement Maître Soumiya Djedaâ, la fille du plaideur. Reprenant son envolée devant ce sucré trio de dames de fer - Latifa Kessenti, Souraya Benhamiche et Adda Souad-Soltana lesquelles font preuve d´un sérieux appétissant. A un moment donné, Souad Adda Soltana souffle à l´oreille de la présidente de la troisième chambre correctionnelle d´Alger. Entre-temps, Maîtres Djedaâ qui venait de plaider cette affaire reportée à plusieurs reprises par la faute d´une veuve éplorée certes, mais démunie d´amour maternel et fait en sorte comme pour punir le beau-père et surtout la belle-mère qui avait tout craché à la barre. Une semaine plus tard, à l´issue d´une mise en examen, Kessenti requinquée lit le verdict qui sera ce qu´avait décidé le tribunal de Hussein-Dey, quatre mois plus tôt.