«Si Al Jazeera n´existait pas, le Qatar ressemblerait à tous les pays de la région.» Robert Menard, ex-SG de RSF et actuel journaliste sur I Télé. Récemment, le magazine Jeune Afrique a publié la liste des 50 personnalités arabes les plus riches, sélectionnées par Forbes et Arabian Business. En parcourant cette liste, on pouvait constater que la moitié des milliardaires arabes étaient saoudiens pour un seul qatari, Bader Al-Darwish, classé même avant-dernier dans ce classement avec 1,7 milliard de dollars. En haut de la liste, on trouve le fringant Al Walid Ibn Tallal avec 19,4 milliards de dollars. Ce saoudien, propriétaire de l´hotel parisien George V, est également actionnaire du groupe audiovisuel Rotana et de la chaîne libanaise LBC. Mais le plus étonnant est de découvrir que la plus grande chaîne du monde arabe, Al Jazeera et ses satellites Al Jazeera Sport et International, n´est la propriété d´aucune de ces fortunes. Al Jazeera serait-elle une télévision publique? En vérifiant on a trouvé que la télévision, qui a battu tous les records d´audience, possède un budget important qui est dépensé dans la technique et les salaires des employés expatriés pour la plupart. Ses principaux sponsors sont essentiellement des entreprises publiques, Qatar Gaz, Qtel, Qatar Airways ou encore quelques constructeurs automobiles avec qui la chaîne a signé des conventions et en échange diffuse des annonces publicitaires. Al Jazeera respire mieux avec les subventions offertes par l´Etat qatari. C´est une télévision publique, non déclarée, au statut privé. C´est pour cette raison essentielle que la télévision la plus détestée du Monde arabe ne critique jamais l´émir ni ses actions. Les seules personnes critiquées sont les membres du gouvernement comme dans les démocraties européennes. Contrairement aux autres grands groupes de télévision, Al Jazeera ne fait pas dans le faste. Elle ne possède pas d´immeuble de plusieurs étages comme Canal+. Elle n´est pas installée dans un quartier d´affaires comme Al Arabya à Dubai Media City ou dans une tour de verre comme TF1. Ses bureaux sont installés dans un petit désert, dans des hangars, (qui donnent plus l´impression d´abris d´avion de la Seconde Guerre mondiale), le tout installé à 20 minutes du principal point de repère des étrangers à Doha, le Sheraton. C´est en voyant les locaux d´Al Jazeera que le président Hosni Moubarak a eu cette citation célèbre: «C´est de cette boite d´allumettes que proviennent tous mes problèmes.» Le siège d´Al Jazeera est entouré de sable et un parking rempli de bolides et de voitures de luxe. Un fois à l´intérieur, on découvre des studios ouverts, comme la plupart des télévisions du monde: C´est un open space, comme CNN ou ABC, où les trois rédactions se côtoient: l´info en arabe, en anglais et le sport. Car en réalité, Al Jazeera a été construite par des techniciens anglais travaillant pour la BBC. Contrairement aux apparences, Al Jazeera n´est pas une télévision riche. Elle n´est pas non plus pauvre. C´est une télévision qui survit grâce à l´aide de l´Etat et des principaux soutiens financiers. L´internationale islamiste fait partie de ses principaux sponsors et certains journalistes occidentaux et même arabes qui haïssent la télévision Qatari, ont même écrit que Ben Laden lui verse des dividendes, à travers les correspondants de la chaîne dans les pays arabes et du Moyen Orient. Une hypothèse qui n´a jamais été prouvée et encore moins vérifiée. Aussi, c´est à se demander comment Al Jazeera, qui fonctionne comme une télévision publique arrive à battre toutes les télévisions privées du monde, même occidentales? [email protected]