Des combats se déroulaient hier à Zinjibar entre les militaires et un millier d'hommes armés qui ont pris le contrôle de la ville, chef-lieu de la province d'Abyane où les extrémistes islamistes sont bien implantés. La prise d´une ville du sud du Yémen par des hommes armés présentés comme des combattants d´Al Qaîda suscite des interrogations sur les commanditaires de cette opération au moment où le régime tente d´assurer sa survie. Des combats se déroulaient, hier, dans la ville de Zinjibar entre les militaires et un millier d´hommes armés qui ont pris le contrôle de cette ville, chef-lieu de la province d´Abyane où les extrémistes islamistes sont bien implantés. Le ministère de la Défense a affirmé que les assaillants, «dont des Afghans et des Egyptiens», appartenaient à Al Qaîda. Mais le principal dignitaire tribal de Zinjibar, Tarek al-Fadhli, lui-même un ancien jihadiste, a dit douter que ces hommes armés, qui ont, notamment pris sans coup férir vendredi un important camp militaire, relèvent d´Al Qaîda. Il n´a pas exclu que le président contesté Ali Abdallah Saleh, qui refuse de démissionner en dépit de la pression populaire, soit «en train de jouer la carte d´Al Qaîda» pour se maintenir au pouvoir. Le chef de l´Etat avait averti le 21 mai qu´Al Qaîda profiterait de son départ: «Si ce régime part, Al Qaîda va connaître un nouvel essor au Hadramaout, à Chabwa et à Abyane», avait dit M.Saleh, qui a fait du combat contre le réseau d´Oussama Ben Laden un atout majeur dans ses relations avec Washington. «Je crois que ces hommes armés profitent du président, et qu´il les utilise à son tour pour brouiller les cartes et provoquer une intervention américaine qui changerait la donne», a estimé M.Fadhli. Selon lui, ces combattants arrivés de la localité voisine de Jaar vendredi, ont pris le contrôle des administrations alors que tous les responsables politiques et de sécurité de la ville fuyaient vers Aden. Ils ont, notamment occupé le camp dit de la «sécurité centrale» sans que les soldats tirent le moindre coup de feu, et ont pu saisir d´importantes quantités d´armements et de véhicules militaires, selon M.Fadhli. «Ces hommes armés affirment faire partie des «Partisans de la Charia» (loi islamique) qui pourrait être une coalition de groupes armés», a indiqué M.Fadhli, qui était interrogé sur l´appartenance de ces combattants. Les combattants, qui ont semé la panique et provoqué l´exode des habitants, selon des témoins, encerclaient lundi la 25e Brigade mécanisée, seule unité à leur résister. L´analyste Saïd al-Janhi, un spécialiste des mouvements islamistes, n´est pas non plus convaincu de la thèse de la prise de la ville par Al Qaîda. «Ce n´est pas dans la méthode d´Al Qaîda de prendre le contrôle de positions fixes et de s´y maintenir, surtout que les drones américains survolent la région», a-t-il dit, rappelant que l´imam radical Anwar Al-Aulaqi, recherché par Washington, a échappé à un tir de missile américain au début du mois. Il a également estimé que l´Etat pourrait être en train «de jouer la carte d´Al Qaîda pour effrayer l´opinion locale et l´Occident». Le chef de l´Etat est accusé par ses détracteurs d´avoir utilisé pendant des années la carte du terrorisme pour se faire valoir aux yeux de l´Occident. M.Janhi souligne que le président avait déjà utilisé des islamistes, notamment des vétérans d´Afghanistan, dans sa guerre contre les sécessionnistes sudistes en 1994. Dimanche, des officiers dissidents ont accusé le président d´avoir «livré la province d´Abyane aux groupes terroristes armés» et appelé l´armée à «leur livrer bataille». L´opposition a également affirmé que M.Saleh avait «livré la ville à des groupes armés» afin «d´agiter l´épouvantail d´Al Qaîda» et de pouvoir continuer à jouir d´un soutien international.