La situation qui prévaut en ce moment, au sein du mouvement citoyen, n'a pas laissé indifférente l'opinion locale kabyle. Les deux sorties publiques des figures de proue des ârchs, en l'occurrence Bélaïd Abrika et Ali Gherbi, ont été largement commentées par les citoyens qui continuaient, hier encore, à en parler. Suivis avec intérêt, le gel des activités de Bélaïd Abrika de la Cadc et le retrait définitif d'Ali Gherbi et son comité de la Cicb, annoncé dans une conférence de presse tenue le mercredi passé au siège de L'Expression à Béjaïa, ont été diversement appréciés par les citoyens dont les avis restent partagés entre soutien et compréhension aux initiatives et indifférence totale autour de ce qui se trame autour des ârchs. Pour bon nombre de citoyens «ces deux gestes» qualifiés de «désespérés» étaient «attendus» eu égard à la persistance des blocages qui ont induit une situation de pourrissement. Pour ces citoyens, visiblement soucieux de la tournure prise par les événements, «la décision d'Ali Gherbi et de Bélaïd Abrika peuvent constituer le déclic attendu pour amener les délégués les plus résistants à se ressaisir avant qu'il ne soit trop tard», allusion au règlement de la crise de Kabylie qui se fait «urgent». Si dans l'ensemble on comprend «les soucis et les intentions» de ces figures charismatiques, décelés dans leurs positions par rapport à la situation et le fonctionnement des structures du mouvement citoyen, il n'en demeure pas moins que «la manière de faire peut conduire à l'éclatement des ârchs» et partant «à la naissance de structures parallèles». En effet, le plus réaliste des citoyens relève que «la démarche de ces deux délégués ne peut être bénéfique que si elle est ralliée par d'autres coordinations sous l'impulsion de la base citoyenne». Tout en comprenant les positions «délicates», qui sont très souvent déclarées «logiques» eu égard à «l'adversité qu'on ne peut combattre dans un fonctionnement par consensus» et se référant au processus de lutte depuis avril 2001, nos interlocuteurs notent que «ce que déclare Ali Gherbi pour justifier son retrait existe réellement et reste même à l'origine de la démobilisation citoyenne». Très au fait de la réalité, ils vous citeront le caractère de «délégué permanent» qui découle, dans la majorité des cas, «de l'absence de consultation de la base». Bizarrement, à aucun moment on n'a relevé les accusations habituelles à l'endroit du pouvoir, qui semble être loin des derniers bouleversements. Partant de ce constat, il est très difficile pour l'instant de connaître l'effet de ces deux sorties sur la stabilité de la région. Au-delà de leurs appréciations, les citoyens dans leur ensemble ont insisté hier, sur «la sauvegarde du caractère unitaire et pacifique» de la lutte, mais surtout sur «l'urgence de faire aboutir les revendications». On estime globalement qu'il n'y a plus de place «ni à la tergiversation ni à la manipulation». Des avertissements, en somme, à peine voilés d'une population qui a chèrement payé ces deux années de crise.