Ali Gherbi est l'une des figures de proue du mouvement des ârchs. Invité hier de notre rédaction, deux jours après l'interwilayas décisive de Oued Amizour, il s'est prêté avec complaisance au passionnant débat qui a eu lieu entre lui et les journalistes de L'Expression. Nous réservant même de grandes révélations sur le déroulement du futur dialogue, les attentes du mouvement, sa stratégie et même son devenir. Il apparaît ainsi que le mouvement, une fois satisfaite la plate-forme d'El-Kseur, ne disparaîtra pas et prendra au contraire part aux différentes échéances électorales, avec même la possibilité pour lui de présenter son propre candidat à la présidentielle d'avril 2004. Quant à la dissolution des assemblées élues, y compris l'APN, le sujet reste plus que jamais d'actualité, voire une sorte de préalable à la mise en place de la plate-forme en question. La question ne pouvait pas manquer d'être posée. Quel sera le devenir du mouvement des ârchs une fois satisfaite la plate-forme d'El-Kseur explicitée à Larbaâ Nath-Irathen? Ali Gherbi, en effet, a déclaré au cours des discussions, d'une part, que «le mouvement est transpartisan» et d'autre part que «ce même mouvement est bien souvent porté à faire de la politique et à se comporter presque comme un parti politique». A cette question, et contre toute attente, la réponse du délégué d'El-Kseur, tombera sans la moindre hésitation: «le mouvement restera indéfiniment, sauf s'il est un jour rejeté par les citoyens». Ali Gherbi, venu casser des tabous et parler des perspectives futures du mouvement, insiste sur le «préalable» de la satisfaction de la plate-forme d'El-Kseur avant toute autre initiative. Mais une fois cette revendication, «nationale», insiste-t-il satisfaite, le mouvement des ârchs ne disparaîtra pas pour autant, et ira même faire de la politique. Dans le cas où les assemblées locales et nationales sont dissoutes, le mouvement des ârchs «prendrait part aux futures élections». Mieux, interrogé sur un éventuel soutien à quelque candidat à la présidentielle future, Ali Gherbi a, une nouvelle fois, surpris son monde en répondant malicieusement que «le mouvement des ârchs pourrait fort bien présenter son propre candidat». Au regard du poids certain du mouvement, notamment en Kabylie et plus ou moins dans tout le centre du pays, cette sortie vient rendre un peu plus incertains les résultats d'un scrutin durant lequel tous les scénarios demeurent permis. Ali Gherbi, en revanche, a refusé de répondre à notre question sur les statuts futurs du mouvement, suivant sa demande d'agrément, et s'il sera donc une association, une organisation ou un parti politique. Dans tous les cas de figure, «le mouvement des ârchs n'en finira pas de sitôt de faire parler de lui» puisqu'il compte continuer à se battre et à formuler de nouvelles revendications en faveur de la démocratie et des libertés le plus longtemps possible. Ce qui est certain, en revanche, c'est que «les structures du mouvement resteront telles quelles, une fois que la plate-forme sera intégralement appliquée et qu'il se sera résolument tourné vers les activités politiques». Cette forme d'organisation horizontale, qui ne sied guère à une formation politique, est en revanche appréciée par Ali Gherbi, mais aussi la plupart des délégués des ârchs. Curieusement, cette forme d'organisation, censée ne pas permettre l'émergence de têtes dépassant les autres, n'en a pas moins engendré un Belaïd Abrika et un Ali Gherbi...L'optimisme certain de ce dernier, tranchant quelque peu la tendance lourde du moment, trahit peut-être des éléments d'information que nous ignorons encore. Ali Ghrebi, en effet, tout en démentant catégoriquement l'existence de contacts avec ce que l'on appelle les émissaires du pouvoir, n'en admet pas moins, des liens indirects avec ce même pouvoir par le biais de nombreux hauts responsables qui sympathisent avec le mouvement des ârchs mais qui ne peuvent afficher leurs visions, sous peine de subir des sanctions administratives et autres. La manière dont est présentée l'offre de dialogue de Ouyahia, quoique ne différant pas grandement de celle qui l'avait précédée, renseigne assez sur les importants non-dits liés à cette question. La satisfaction de la plate-forme d'El-Kseur se précise à mesure que se rapproche la présidentielle. Ce n'est donc pas pour rien que Ali Gherbi pense déjà à la phase post-plate-forme.