Si une enquête est menée pour connaître les circonstances de la mort d'El Gueddafi, ce sera sans son autopsie. Les nouvelles autorités libyennes ont annoncé hier qu'aucune autopsie ne serait pratiquée sur le cadavre de l'ancien dirigeant Mouamar El Gueddafi, toujours exposé dans une chambre froide à Misrata, à la veille de la proclamation officielle de la libération du pays. «Il n'y aura pas d'autopsie aujourd'hui (samedi), ni un autre jour. Personne n'ouvrira le corps», a déclaré le porte-parole du conseil militaire de Misrata, Fathi Bachagha, alors que des informations faisaient état d'une autopsie dans la journée. Cette déclaration a été confirmée par deux autres membres du conseil militaire de Misrata. Mouamar El Gueddafi, 69 ans, en fuite depuis la chute le 23 août de son QG à Tripoli, a été capturé vivant jeudi à Syrte, sa région d'origine, et tué par balles peu après. Il n'est toujours pas clair s'il a été exécuté ou s'il a péri dans des échanges de tirs. Les images et vidéos prises au moment de son arrestation à Syrte (360 km à l'est de Tripoli) laissent d'ailleurs entrevoir différentes hypothèses sur les causes de la mort du «Guide». Vendredi, le N.2 du Conseil national de transition (CNT), le nouveau pouvoir en Libye, Mahmoud Jibril, a assuré qu'il avait succombé à des blessures par balles après des tirs de feux croisés pendant son arrestation. Mais cette version n'a pas convaincu l'ONU et Amnesty International qui ont demandé une enquête pour déterminer s'il avait été exécuté sommairement. Sur le terrain, quand on aborde le sujet controversé avec les combattants qui exhibent fièrement leurs prises (pistolet plaqué or, foulard beige du dictateur, etc), le ton change et l'ambiance se raidit. «Il était salement amoché quand on l'a vu. On savait qu'il allait mourir», lance l'un d'eux, Ibrahim Al-Marjoub. Derrière eux, l'un des chefs vient de glisser une consigne en arabe. «Tout le monde dit: «Personne ici n'a tué El Gueddafi». Selon M. Bachagha, Abdelhakim Belhaj, chef du conseil militaire de Tripoli, était attendu à Misrata pour voir le corps de l'ex-dirigeant, au lendemain de la visite de M. Jibril, mais la venue du président du CNT Mustapha Abdeljalil n'était pas annoncée. Depuis Benghazi, M. Abdeljalil a confirmé qu'une enquête était en cours sur les circonstances de la mort de l'ex-dictateur, sans évoquer une autopsie. Mouamar El Gueddafi sera sans doute enterré dans un lieu secret pour éviter tout pèlerinage sur sa tombe, avaient déclaré des membres du conseil militaire de Misrata. La dépouille de l'ancien dirigeant était toujours exposée dans la chambre froide d'un marché de la banlieue de Misrata, où le cadavre de son fils Mouatassim avait été emmené dans la nuit de vendredi à samedi. Quelques dizaines de curieux faisaient la queue pour voir les deux dépouilles, allongées côte à côte sur des matelas au sol et recouvertes d'une couverture ne laissant voir que leur tête. Les circonstances de sa mort sont sujet de polémique. Les Etats-Unis ont dit attendre du Conseil national de transition libyen qu'il détermine de façon transparente les causes de sa mort. L'administration Obama souhaite également que «les prisonniers soient traités humainement», a déclaré Mark Toner, le porte-parole du département d'Etat. Pour Moscou aussi, la mort d'El Gueddafi soulève nombre de questions, en particulier sur la légalité de la frappe de l'Otan contre son convoi. L'Otan annonce qu'elle n'était pas au courant que le leader se trouvait dans le cortège. Elle ajoute qu'elle mettra fin à son opération militaire en Libye le 31 octobre.