Des milliers de Libyens ont assisté à Benghazi hier à la proclamation de la «libération» de la Libye Une cérémonie, au cours de laquelle le président du Conseil national de transition (CNT) Mustapha Abdeljalil a proclamé la «libération» de la Libye, a eu lieu hier à Benghazi. Des milliers de personnes, agitant le drapeau vert-noir-rouge de la nouvelle Libye, étaient rassemblées sur la place centrale de Benghazi, la deuxième ville du pays, où avait débuté à la mi-février un soulèvement contre le régime de Mouamar El Gueddafi, tué jeudi. M. Abdeljalil et plusieurs hauts responsables du CNT, les nouvelles autorités au pouvoir en Libye, assistaient à la cérémonie qui a été ouverte avec le nouvel hymne national libyen. Cette cérémonie de proclamation officielle de la «libération» de la Libye intervient trois jours après la chute de Syrte, qui était le dernier bastion des forces loyales à Mouamar El Gueddafi, qui y a été tué jeudi après avoir dirigé le pays sans partage pendant 42 ans. L'annonce officielle de la fin de huit mois de rébellion armée a été le point de départ d'un processus politique censé aboutir à des élections générales dans un délai d'environ 20 mois. La proclamation tant attendue était cependant assombrie par la polémique autour des circonstances de la mort de l'ancien dirigeant, tué après avoir été capturé vivant. Pour le Royaume-Uni, cet incident a «un peu terni» la réputation du Conseil national de transition (CNT). Des responsables du CNT ont annoncé hier que le corps de l'ancien «Guide de la révolution» avait été autopsié dans la matinée, et qu'il serait à terme remis à ses proches, qui décideront «en concertation avec le CNT» du lieu de sépulture. La proclamation de la «libération totale» de la Libye a eut lieu dans l'après-midi d'hier à Benghazi, deuxième ville du pays à un millier de kilomètres à l'est de Tripoli et ancienne «capitale» de la rébellion, qui y a vu le jour à la mi-février. En début d'après-midi, des centaines de personnes, civils ou combattants, étaient déjà rassemblées sur la place centrale de la ville, agitant le drapeau vert, noir et rouge des nouvelles autorités, au rythme des chants révolutionnaires retransmis par haut-parleurs. Des combattants s'embrassaient devant des bannières et des photos en hommage aux «martyrs», leurs camarades morts au combat. Un important dispositif policier était en place pour assurer la sécurité. Le CNT attendait la prise de Syrte, dernier bastion pro-El Gueddafi tombé jeudi, pour proclamer la libération du pays. Selon la feuille de route des nouvelles autorités publiée en septembre, cette proclamation doit être suivie au plus tard dans un mois par la mise en place d'un gouvernement de transition. Ce gouvernement devra ensuite organiser dans un délai de huit mois l'élection d'une Assemblée chargée de désigner un comité pour rédiger une nouvelle Constitution et d'organiser des élections générales dans un délai maximum d'un an après sa constitution. La formation du gouvernement de transition risque d'être compliquée par de multiples luttes de pouvoir: libéraux contre islamistes, tensions régionalistes, rivalités tribales, ambitions individuelles ou pour le contrôle des revenus du pétrole... Le «Premier ministre» libéral du CNT, Mahmoud Jibril, a d'ailleurs déjà annoncé qu'il renonçait à participer au futur gouvernement, prévenant aussi qu'après des mois de guerre civile, la reconstruction de la Libye ne serait «pas une tâche facile». Outre ces défis pesant sur l'avenir, le CNT devait aussi affronter hier les critiques sur la mort de Mouamar El Gueddafi jeudi à Syrte. Les autorités ont assuré qu'il avait succombé dans des échanges de tirs, mais des témoignages et les vidéos tournées au moment de son arrestation n'écartent pas l'hypothèse d'une exécution sommaire. La veuve de M. El Gueddafi et plusieurs organisations internationales, dont l'ONU et la chef de la diplomatie américaine, Hillary Clinton,, ont réclamé une enquête. Le président du CNT, Mustapha Abdeljalil, a assuré samedi qu'une investigation était en cours. Et Mahmoud Jibril s'est dit «totalement d'accord» avec l'ouverture d'une enquête internationale, à condition qu'elle respecte le rite funéraire musulman. «Personnellement, j'aurais préféré qu'il (Mouamar El Gueddafi) soit vivant. Je veux savoir pourquoi il a fait ça au peuple libyen. J'aurais aimé être son procureur lors de son procès», a-t-il affirmé samedi sur la BBC. Au moment où les combattants pro-CNT étaient accueillis en héros dans leurs villes d'origine, Syrte avait des airs de cité fantôme parsemée de cadavres. Pas un bâtiment n'a été épargné par les semaines de bombardements et de combats, tous les magasins sont fermés et il n'y pas de trace des dizaines de milliers d'habitants. Alors que l'Otan doit mettre fin à sa mission militaire le 31 octobre, après sept mois d'opérations, le ministre français de la Défense, Gérard Longuet, a estimé dimanche qu'elles avaient coûté à la France un peu plus de 300 millions d'euros.