Un signe de la main qui veut tout dire Un répertoire d'exception, une voix sublime, des vers évocateurs et une présence qui ne laisse pas indifférent. Qu'en restera-t-il dans dix ans? A en juger par la longue file formée hier dès les premières heures du matin au Palais de la culture pour permettre aux Algériens de rendre hommage à Warda, il est permis de conclure qu'elle suscite une grande estime chez ses compatriotes. Les commentateurs sont nombreux à évoquer son oeuvre. Ils vont même jusqu'à la qualifier de la princesse du Tarab Al-Arabi. Au rang des commentateurs qui évoquent le destin fabuleux de la chanteuse, il y a même des admirateurs étrangers, notamment parmi la communauté de l'art. Ils n'hésitent plus à la surnommer la diva par évocation de son héritage musical exceptionnel. Son nom n'est pas loin de rappeler aux mélomanes qu'elle dispose d'un des plus illustres patrimoines. Même les jeunes générations en connaissent un bout sur sa carrière puisque ses clips sont diffusés à longueur de journée. Ses diverses productions en Algérie sont gravées dans les mémoires. Et c'est tout cela qui restera encore pendant longtemps dans la mémoire collective. L'Orient a eu sa Oum Kalsoum. Voilà que le Maghreb en a aussi une. Un répertoire d'exception, une voix sublime, des vers évocateurs et une présence qui ne laisse pas indifférent suffisent à faire de Warda une figure incontournable de la chanson. Qu'en restera-t-il dans dix ans? Les jeunes fredonneront-ils ses morceaux? Se tourneront-ils vers le rap? Certains espèrent que l'une de ses autres qualités, la simplicité, puisse contribuer à maintenir intact son statut de diva. De son vivant, elle a connu une immense célébrité et elle a pu acquérir une place privilégiée au podium de la chanson arabe. Les qualités humaines de l'artiste sont louées par tous. Elle disparaît au moment où ses fans se préparaient à écouter sa voix à l'occasion de la célébration du Cinquantenaire de l'Indépendance. Wadra El Djaraïria continuait à travailler inlassablement pour préparer ce rendez-vous. Elle était sur le point de produire un clip spécial pour cette célébration. D'aucuns décèlent en Warda un savant mélange de patriotisme et de grandeur d'âme. Elle mettait l'accent sur ces valeurs depuis des années, lors de chacun de ses entretiens parus dans les journaux. Les rubriques culturelles lui ont toujours consacré un espace conséquent. La cantatrice avait son propre style. Sera-t-il égalé? Sera-t-il dépassé? Tombera-t-il dans l'oubli? Ce que les Algériens n'oublieront pas, par contre, est qu'elle a pu par la force de l'émotion, drainer des dizaines de femmes au cimetière d'El Alia. C'est du jamais-vu depuis l'assassinat de Djilali Liabès au début des années 1990. Voilà une bonne manière de ne pas reléguer la femme à son coin cuisine. Comme le souhaitent une poignée de rétrogrades et de conservateurs. C'est sa contribution au mouvement de la libération de la femme des griffes du patriarcat. Des hommages, elle en a reçus, même à l'étranger. Le lancement du Festival Mawazine Rythmes du Monde à Rabat a été donné dans la nuit de vendredi à samedi avec un hommage à cette incône de la chanson. Sa disparition est quasi simultanée avec celle d'une autre grande chanteuse: l'Américaine Donna Summer. Que se diront-elles là-haut en évoquant le diktat des maisons de disques sur l'orientation des goûts musicaux et de la déferlante du téléchargement sur Internet qui prive les artistes de leurs revenus? Un public international gardera impérissables les passages de Warda, car elle n'a pas chanté qu'en Algérie. Si les salles de concert n'ont pas suffi à contenir sa voix, elle passe depuis des années sur de nombreuses radios et télés consacrées à l'art. Elle a tenté de négocier le virage pour surfer sur la vague jeune. Y est-elle parvenue? Réponse dans quelques années. Les réactions Ouyahia profondément affligé «C'est une grande perte pour l'art» Le Premier ministre, M.Ahmed Ouyahia, a adressé un message de condoléances à la famille de la chanteuse Warda El Djazaïria, décédée jeudi soir au Caire, dans lequel il écrit que «la disparition de cette diva constitue une grande perte pour l'art authentique arabe». «C'est avec une profonde affliction que j'ai appris la nouvelle du décès de Warda El Djazaïria, cette grande diva de la chanson dont le départ constitue en soi une grande perte pour l'art arabe authentique, algérien en particulier», écrit M.Ouyahia dans son message. «On ne peut que ressentir une profonde tristesse suite à la disparition de cette diva au talent vrai et avéré, elle qui a chanté à la gloire de la patrie avant de faire la grandeur de la chanson algérienne et arabe et la hisser aux plus hauts sommets de la créativité», a-t-il ajouté. «Le destin a voulu que cette belle voix se taise au moment où l'Algérie s'apprête à célébrer le 50e anniversaire de son Indépendance, d'autant que la défunte a toujours été aux rendez-vous des grands événements nationaux», a encore ajouté le Premier ministre. «En cette douloureuse épreuve, je vous présente, à vous ainsi qu'à tous les admirateurs de la défunte, mes condoléances les plus attristées et vous assure de ma profonde sympathie priant le Tout-Puissant de lui accorder Miséricorde et Clémence et de l'accueillir en Son Vaste Paradis», conclut M.Ouyahia dans son message. Mme Khalida Toumi exprime sa peine «L'une des plus belles voix d'Algérie s'est tue» «L'une des plus belles voix d'Algérie et du Monde arabe vient de se taire à jamais», a écrit la ministre de la Culture, Mme Khalida Toumi, dans un message de condoléances, à la suite du décès jeudi au Caire de la chanteuse Warda El Djazaïria. «Warda El Djazaïria nous a quittés en laissant derrière elle un silence assourdissant et une profonde tristesse», poursuit Mme Toumi qui exprime à la famille de la défunte son «immense peine» et sa «grande affliction». Nacer Mehal rend hommage à la princesse du Tarab el aarabi «Elle a mis son talent au service de son pays» Le ministre de la Communication, M.Nacer Mehal, a adressé un message de condoléances à la famille de Warda El Djazairia, ainsi qu'au monde de l'art et de la culture, suite au décès au Caire de la chanteuse algérienne. Tenant à rendre l'hommage qui sied à la princesse du «Tarab el aarabi» et à s'associer au deuil de sa famille, M.Mehal a exprimé sa douleur que «le monde de la culture algérien et de la culture arabe perde en Warda El Djazaïria une voix d'or et également une artiste au sens propre du terme». Warda El Djazaïria, écrit le ministre de la Communication, «a incarné pour plusieurs générations le don de soi, en mettant son immense talent au service de son pays». Il a également salué l'«engagement patriotique» de la diva à travers ses chansons et par sa présence lors des célébrations des grandes dates de l'histoire de la nation. «Aujourd'hui au panthéon, elle (Warda El Djazaïria) laisse le souvenir d'un attachement profond à un drapeau et à un hymne qui ont imprégné les images et le son de ses prestations multiples sur toutes les scènes du monde» écrit encore le ministre. Décédée jeudi au Caire à l'âge de 72 ans d'une attaque cardiaque, la dépouille mortelle de Warda El Djazaïria est attendue vendredi en début de soirée à Alger après avoir reçu un ultime hommage au Caire. Une cérémonie de recueillement est prévue samedi matin à partir de 09h au Palais de la culture Moufdi-Zakaria avant l'enterrement prévu en début d'après-midi au cimetière d'El Alia, alors qu'un registre de condoléances est mis à la disposition du public dans les salles El Mougar et Atlas d'Alger.