Le Soudan et le Soudan du Sud devaient reprendre, hier à Addis-Abeba, leurs négociations de paix interrompues par de violents combats fin mars qui les ont entraînés au bord d'un conflit généralisé. Les pourparlers, destinés à régler les différends toujours en suspens plus de dix mois après l'accès à l'indépendance du Soudan du Sud, devaient démarrer dans l'après-midi d'hier, mais aucune heure n'est encore précisée. «Nous espérons de bonnes choses, tout dépend de l'autre partie», a commenté hier à Addis Abeba le négociateur en chef sud-soudanais Pagan Amum, avant de participer à une réunion interne à la délégation sud-soudanaise en présence du ministre sud-soudanais des Affaires étrangères Nhial Deng Nhial. Les tensions demeurent vives entre Juba et Khartoum: le Sud a encore accusé lundi le Nord de bombardements aériens et tirs d'artillerie - démentis par son voisin du Nord. Mais le président sud-soudanais, Salva Kiir, a souligné qu'un «dialogue amical sur les questions en suspens avec Khartoum était la seule voie vers la paix». Le Soudan s'est, de son côté, dit prêt à quitter, sous condition, la région contestée d'Abyei, au coeur des tensions. Selon un porte-parole de l'armée soudanaise, Sawarmi Khaled Saad, le retrait, après un an d'occupation, vise à «offrir un environnement propice aux discussions» d'Addis Abeba. C'est une brève conquête par l'armée sud-soudanaise du plus important puits de pétrole soudanais, celui de Heglig, et une série de bombardements soudanais en territoire sud-soudanais qui ont mis le feu au poudre ces dernières semaines. Khartoum a claqué la porte des négociations début avril et jamais depuis l'accès à l'indépendance du Sud en juillet 2011 les deux voisins n'ont semblé si proches d'un nouveau conflit ouvert. Avant les accords de paix de 2005, qui ont ouvert la voie à la partition du Soudan, Juba et Khartoum se sont livré des décennies de guerre civile. Sous la pression internationale - du Conseil de sécurité de l'ONU et de l'Union africaine, qui joue les médiateurs dans la crise soudanaise -, les deux parties ont finalement accepté la semaine dernière de reprendre le dialogue. Juba et Khartoum revendiquent toutes deux le contrôle d'Abyei, une région grande comme le Liban. Mais elles s'opposent aussi sur le partage des ressources pétrolières du Soudan d'avant la partition - le Sud a hérité des trois-quarts des réserves de brut du pays mais reste tributaire du Nord pour exporter - et s'accusent mutuellement de soutien à des groupes rebelles sur le sol de l'autre. La démarcation de la frontière Nord-Sud n'a jamais, non plus, été finalisée. L'objet immédiat des négociations, dont on ignore encore la durée, est d'obtenir un engagement clair des deux pays à respecter une zone démilitarisée à la frontière. En cas de succès, les discussions pourraient aborder les autres points de contentieux. Mais signe des difficultés qui s'annoncent, Khartoum demande, pour se retirer d'Abyei, la garantie que la région sera reconnue partie intégrante de son territoire. En attendant, les agences humanitaires ne cessent d'attirer l'attention sur le sort des civils vivant dans les zones frontalières et des dizaines de milliers de Soudanais et Sud-Soudanais qui, les uns et les autres bloqués sur le territoire voisin, attendent depuis des mois de pouvoir rentrer chez eux.