L'ancien président tunisien Ben Ali serait prêt à renoncer, au profit de son pays, à ses avoirs qui pourraient se trouver en Suisse, selon son avocat libanais Me Akram Azoury, une déclaration d'intention qui n'empêchera pas les poursuites, a prévenu Tunis. «Je vous prie de prendre note que mon client se désiste en faveur de l'Etat tunisien de tous prétendus avoirs ou ressources économiques qui se trouveraient sur le territoire suisse et revenant à l'ancien président Zine El Abidine Ben Ali », écrit-il dans un projet de lettre. L'avocat compte transmettre ce courrier au ministère suisse des Affaires étrangères, mais a ajouté que le chef de l'Etat déchu ne reconnaissait pas l'existence de tels avoirs. « Le président Ben Ali dément toujours vigoureusement posséder des avoirs en dehors du territoire tunisien, ni en Suisse ni dans n'importe quel autre pays », a-t-il dit. «Je veux mettre fin aux surenchères », a expliqué l'avocat, affirmant que « la Suisse avait annoncé avoir gelé des avoirs sans dire lesquels et le montant ». Dans son projet de lettre, Me Azoury indique que la Suisse est « irrévocablement » autorisée à remettre à la Tunisie «ces prétendus avoirs et ressources (...) sans qu'il soit nécessaire de suivre aucune formalité judiciaire et extra-judiciaire et sans même en référer à mon client ». Le chef du parti Ennahda, majoritaire au gouvernement tunisien, Rached Ghannouchi, a souligné que M. Ben Ali n'échapperait pas pour autant à la justice de son pays. « Qu'il fasse cela (rendre ses avoirs, ndlr), nous serons heureux de récupérer l'argent qui a été volé et se trouve à l'étranger. Nous ne manquerons pas de le juger pour tous ses crimes », a dit M. Ghannouchi, qui a passé vingt ans en exil sous Ben Ali. « Ben Ali est poursuivi en justice pour des biens mal acquis mais il y a aussi beaucoup d'autres crimes », a renchéri le ministre de l'Intérieur, Ali Larayedh, longuement emprisonné sous l'ancien régime. Fin juin, une délégation d'experts tunisiens avait rencontré à Berne et à Lausanne des responsables suisses en charge du dossier de la restitution d'avoirs gelés. Pour les autorités suisses, l'objectif est «de parvenir aussi rapidement que possible à la restitution des avoirs d'origine illicite détenus par l'entourage » de M. Ben Ali. En octobre dernier, Berne avait indiqué avoir bloqué pour 60 millions de francs suisses (48,7 millions d'euros) d'avoirs tunisiens. Ben Ali a pris la fuite le 14 janvier 2011 à l'issue de la révolution et vit en Arabie saoudite. Ce pays n'a jamais réagi aux demandes d'extradition de Tunis. L'ex-président a déjà été condamné par contumace en Tunisie à de lourdes peines, notamment à perpétuité pour complicité d'homicides volontaires, et lui et ses proches sont aussi accusés d'une multitude de crimes économiques et financiers.