Bendar Ben Sultan, Hamad Ben Jassam Le prince saoudien Bandar Ben Sultan et le cheikh qatari Hamad Ben Jassam coordonnent avec la CIA pour déstabiliser les pays arabes. Un prince ami de Washington devenu responsable des services secrets saoudiens est une nouvelle qui doit donner froid dans le dos aux dirigeants arabes. Surtout si cette entente est doublée d'une connivence avec les Qataris, notoirement connus comme des soutiens indéfectibles aux opposants d'El Gueddafi d'abord, et à ceux de Bachar Al Assad ensuite. Deux hommes mettent en scène un sinistre scénario. Ce sont le prince saoudien Bandar Ben Sultan du côté saoudien et cheikh Hamad Ben Jassam du côté qatari. Le premier est responsable des services secrets et le second ministre des Affaires étrangères du Qatar et Premier ministre. Avec le Qatar, l'Arabie Saoudite joue au profit de l'ami américain le rôle de gendarme au Moyen-Orient. Grâce aux dollars engrangés par la vente du pétrole, ils financent les opposants. Ainsi, deux milliards de dollars ont été dépensés par le Qatar pour aider les rebelles libyens. Les sommes versées au Mujao, groupe terroriste sévissant au Sahel, ne sont pas connues mais au vu des menaces que le groupe fait peser sur l'Algérie et d'autres pays de la région, on peut conclure que l'aide est quand même assez conséquente. Avec les deux faucons qui ont pignon sur rue dans leurs capitales respectives, ce n'est pas demain la veille qu'on en finira avec la politique d'ingérence dans les affaires intérieures des Etats. Ils l'ont encore prouvé à Doha le 23 juillet dernier. C'était d'ailleurs le Qatari qui a pris la parole devant la presse pour presser le président syrien Bachar al-Assad de renoncer rapidement au pouvoir en échange d'une sortie sûre pour lui-même et sa famille. Ce qui n'est pas éloigné de la vision saoudienne. Pour joindre l'acte à la parole, les deux pays, toujours avec l'aide des Américains, sont en train de soutenir à bout de bras une nouvelle base établie en Turquie afin d'appuyer les opposants à Al Assad. D'ailleurs, avec la nomination de Bandar à la tête de ses services de renseignements, en juillet dernier, l'espoir est grand pour l'Arabie Saoudite de maintenir intacts les liens avec le grand ami américain. Le prince était ambassadeur saoudien à Washington pendant 22 ans (de 1983 à 2005). Il jouissait d'un accès direct aux plus grands responsables: Dick Cheney, Colin Powel, Condoleezza Rice. Le roi Abdallah, en rappelant un diplomate de carrière, compte ainsi sur quelqu'un qui saura parler aux Américains avec lesquels il garde toujours ses accointances. Ce qui n'est pas du goût des régimes arabes en place. Un attentat a même visé le prince. Il était donné pour mort avant que la presse saoudienne n'oppose un démenti dix jours après les faits supposés. Bandar est soupçonné d'avoir donné son aval à l'attentat qui a coûté la vie à quatre dirigeants du régime syrien dont des responsables de l'appareil sécuritaire à Damas. Cette puissance de feu n'est pas actionnée lorsqu'il s'agit de régimes alliés comme le Bahrein: le prince et le cheikh n'ont pas hésité à encourager l'envoi de blindés pour «pacifier» ce pays. Quant à la démocratisation, on doit repasser. D'ailleurs, quels régimes démocratiques peuvent bien promouvoir ces monarchies qui n'éprouvent aucune gêne à réprimer minorités et opposants? N'empêche que le discours séduit. En tout cas, il faudrait bien quelques alliés pour Riyadh et Doha pour prétendre reprendre leur place sur l'échiquier régional à la faveur des mutations géostratégiques que connaît le Monde arabe et qui vont conduire à de nouveaux rôles pour la Turquie et l'Iran qui sont des puissances extra-arabes. Les deux hommes sont mandatés pour que leurs pays puissent réévaluer les méthodes de travail de leur diplomatie dont le rôle s'est éclipsé, au profit de l'Iran et de la Turquie, après les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis et l'invasion de l'Irak en 2003. Pour mener la manoeuvre, les deux pays s'offrent des dollars (puissance économique), des armes (puissance militaire) mais aussi une puissance diplomatique lorsqu'il s'agit d'actionner l'influent Conseil de coopération du Golfe. Outre l'Arabie Saoudite, il ne renferme pourtant que de petits pays à la taille d'un pois chiche comme le Qatar, le Bahreïn, les Emirats Arabes Unis, le Koweït et Oman. Mais ils ont la particularité d'abriter des forces américaines et surtout de trôner sur un matelas de pétrole et de gaz. Avec ces atouts, le prince et le cheikh ne sont pas loin de penser que leurs pays pourraient être la locomotive du Monde arabe. Même le Maroc et la Jordanie ont été invités à intégrer ce club des émirs et rois pour maintenir leur longévité et se prémunir des mouvements de populations. Le CCG a consacré environ 20 milliards de dollars d'aide au Maroc sur une période de cinq ans. La presse marocaine ne se trompe pas lorsqu'elle parle d'une tentative de création d'un syndicat des rois et des princes, qui défendrait leurs régimes héréditaires des révoltes en cours dans la région. Le chef du renseignement saoudien qui est également secrétaire général du Conseil de sécurité nationale ne se privera certainement pas d'en faire un outil de répression pour mener à bien cette tâche de défendre le trône de sa famille. Au Qatar aussi, la sécurité intérieure est un impératif vital. Mais un tout autre traitement est réservé à Al Assad sur lequel ils font peser des menaces. La frustration de Ryadh et de Doha est grande face au blocage par Moscou et Pékin de leurs efforts pour une intervention en Syrie. Les deux capitales sont favorables à la fourniture d'armes à la rébellion. Même s'il faut embraser toute la région.