Le club des Vert et Rouge traverse une nouvelle zone de turbulences. Il risque d'y avoir du monde aujourd'hui, en début d'après-midi, au stade Omar Hamadi de Bologhine. Quoi de plus normal, nous diriez-vous, il y a certainement du Mouloudia d'Alger et s'agissant du club le plus populaire du pays, il faut s'attendre à ce qu'il soit suivi par une masse de supporters même lors des entraînements. Mais là il s'agit d'une séance assez spéciale qui survient juste après la débâcle de l'équipe face au CRB, laquelle débâcle faisait suite à une autre défaite dans un autre derby face au RCK au standing moins élevé. Vous l'avez compris, s'il y aura du monde au stade de Bologhine, c'est essentiellement pour faire valoir sa colère après les deux piètres sorties du club des Vert et Rouge. Dans ce scénario, il est une personne qui sera particulièrement ciblée c'est bien Noureddine Saâdi, le coach mouloudéen. En cela, il ne fera que subir le sort voué à tout entraîneur dont l'équipe subit des revers. Une pratique courante en Algérie où, lorsqu'on perd, ce n'est ni la faute aux dirigeants, ni celle des supporters et encore moins celle des joueurs mais bien celle de celui qui dirige techniquement et tactiquement l'équipe. Il n'aura donc suffi que de deux défaites de suite pour mettre le feu à la maison mouloudéenne et des supporters qui dans leur rage et colère n'ont pas trouvé mieux que de saccager des sièges du stade olympique. C'est devenu une sale habitude. Ces supporters d'un autre bord semblent vouloir dire: «Laissez notre équipe gagner sinon on casse tout!». Ce qu'ils ne savent pas, c'est que des méthodes dissuasives sur le plan sportif existent et parmi elles la suspension pure et simple du Mouloudia. Cela s'est bien fait en 1965 et le MCA n'en mourut pas mais au moins cela avait permis de laisser sur le carreau toute la horde de pseudo-supporters qui pensent aimer le club mais qui, en fait, lui causent un préjudice énorme. On se demande même si ce n'est pas à cause d'eux que les joueurs ne s'expriment pas correctement sur le terrain. Nul ne contestera le fait que la pression que subissent les joueurs du Mouloudia n'a rien à voir avec celle des joueurs des autres équipes. Il s'agit là d'un club particulier qui fait stade comble à chacune de ses sorties. On imagine aisément la peur avec laquelle les joueurs pénètrent sur le terrain, cette peur de mal faire qui risque d'attirer les foudres des supporters. Des supporters qui vont jusqu'à menacer d'empêcher Saâdi d'entraîner cet après-midi l'équipe et qui vont jusqu'à affirmer qu'ils sont prêts à empêcher le Mouloudia de jouer jeudi prochain contre le CA Batna. Voilà donc, la rançon de la politique de la rue qui transforme le MCA en un club quelconque, lui dont l'aura et le prestige lui commandent d'être au sommet du football algérien. Dans cette tourmente, Noureddine Saâdi ne veut pas céder. L'entraîneur mouloudéen estime avoir accompli jusqu'à présent un travail convenable avec ce club: «Je pense que le Mouloudia accomplit sa meilleure saison en division 1 depuis 1999, année de son sacre de champion d'Algérie». Pour lui, les défaites face au RCK et au CRB sont à mettre sur le compte d'accidents de parcours comme les subissent tous les autres clubs. Du reste, il continue à arguer du fait qu'il ne faut pas s'attendre à des merveilles du Mouloudia cette saison. «Je le dit et je le répète: un club qui vient juste d'accéder et qui ne dispose pas d'un effectif aussi étoffé qu'on le croit ne peut ambitionner de jouer les premiers rôles». Il y a que le Mouloudia connait une courbe ascendante depuis qu'il fut stoppé net par une longue trêve due au report de matches et à la rencontre Algérie-Niger, une trêve qui dura exactement 27 jours. «C'est elle en grande partie qui a été derrière notre échec face au RCK. Les joueurs manquaient de compétition en plus du fait qu'ils sont tombés sur une équipe hypermotivée.» Pour ce qui est de l'échec face au CRB, Saâdi continue à parler de la longue trêve mais il ajoute le rôle imparfait tenu par les joueurs. «Nous avions accompli une fort belle première mi-temps même si nous avons pris un but. A la pause, j'ai demandé aux joueurs de rester groupés, d'éviter de se lancer à corps perdu pour égaliser rapidement car le CRB était dangereux en contre. Or, à peine la seconde période est-elle entamée que mes joueurs ont fait tout le contraire de mes consignes. Résultat: le second but de Badji. A la fin, ils ont reconnu leur erreur, ils me l'ont dit mais le mal avait été fait». Le reproche lui a été fait sur le choix de l'équipe qui a été alignée. «Je sais, on m'en veut de n'avoir pas fait jouer Dellalou et Benali. Pour le premier, il relevait de maladie. Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas joué. Je ne pouvais prendre le risque de le faire jouer. Pour ce qui est du second, voyant que ma défense risquait de subir le jeu, j'ai préféré donner plus d'assise au milieu en incorporant Naceri et Chenoufi». Mais l'entraîneur mouloudéen trouve une autre explication à l'échec de dimanche soir. «En voyant Cheche jouer, je me suis dit que le CRB s'est métamorphosé. Voilà un joueur qui a été rejeté au point où on parlait de son retour à l'USMH et qui soudainement, face au MCA, fait un match du tonnerre. C'est donc qu'il était hypermotivé et qu'il voulait prouver sa valeur. Mais je vois aussi un autre argument. Les joueurs du CRB n'avaient pas été payés et ils devaient l'être après notre match bien entendu en cas de victoire. C'est donc avec une énorme volonté de bien faire qu'ils ont affronté le Mouloudia dont les joueurs avaient, eux, déjà reçu 50% de leur prime de signature». Il reste que Noureddine Saâdi ne veut pas lâcher prise. «Ce n'est pas ainsi de déguerpir. Ce n'est pas dans mes habitudes. Je serai samedi après-midi pour entraîner l'équipe». Du côté des dirigeants, on veut jouer la prudence. Contacté par nos soins, M. Messaoud Turki, le vice-président de la section football, nous a dit: «C'est triste ce qui arrive mais il convient de faire preuve de sang-froid donc, de ne pas tomber dans les décisions hâtives. Avec la fête de l'Aïd, rien n'a été décidé. Je pense qu'au courant de cette semaine, on décidera des suites à donner à cette affaire. Les jours qui viennent nous éclaireront sur le sujet».