Nouvel épisode dans l'affaire Mohamed Merah en moins de 24 heures. Après les révélations du journal Le Monde faisant état de 1800 appels téléphoniques que Merah aurait passés en six mois, deux familles de victimes de Mohamed Merah demandent l'audition par la justice de l'ex-patron des services de renseignements français, Bernard Squarcini, après la déclassification de documents sur la surveillance dont le tueur avait fait l'objet, a annoncé, hier leur avocat. La récente déclassification des documents de la Direction centrale du renseignement intérieur (Dcri) montre que ces services avaient repéré Mohamed Merah dès 2009, deux ans après que le nom de son frère aîné, Abdelkader, 29 ans, eut été répertorié comme membre de la mouvance islamiste radicale de Toulouse (sud-ouest). Selon ces documents déclassifiés, la police française avait jugé, fin 2011, le comportement de Mohamed Merah «inquiétant». Mohamed Merah, Franco-Algérien de 23 ans, a assassiné trois enfants et un enseignant juifs dans une école de Toulouse le 19 mars 2012, après avoir abattu trois militaires à Toulouse et à Montauban les 11 et 15 mars. Il a été tué par la police le 22 mars après un siège de 32 heures de son domicile à Toulouse. Bernard Squarcini avait alors soutenu que l'enquête menée par ses services avait conclu qu'il «n'y a(vait) rien» contre Merah qui semblait «s'être radicalisé seul». Selon le document de la Direction centrale du renseignement intérieur (Dcri), repris par Le Monde, l'auteur de l'assassinat de trois enfants et un enseignant juifs dans une école de Toulouse le 19 mars, et de trois soldats à Toulouse et à Montauban les 11 et 15 mars, a passé plus de 1800 coups de téléphone en six mois, de septembre 2010 à février 2011, dont 186 à des correspondants dans 20 pays. Dans un document du 26 avril 2011, déclassifié à la demande des juges d'instruction, la Direction centrale du renseignement intérieur (Dcri) note «1863 communications relevées entre le 1er septembre 2010 et le 20 février 2011», et notamment 186 appels à des correspondants à l'étranger répartis dans 20 pays différents. Le tueur, repéré dès 2009 par la Dcri, a notamment joint par SMS ou vocalement 94 fois des correspondants en Egypte où séjournait alors son frère Abdelkader. Il a également appelé son père qui vit en Algérie. D'autres correspondants ont été joints en Grande-Bretagne, en Espagne, en Côte d'Ivoire, au Kenya, en Croatie et même au Bhoutan. Vingt-trois documents de la Dcri, partiellement déclassifiés, ont été remis début août aux trois juges d'instruction chargés de l'enquête sur les tueries de Toulouse et Montauban. Ces documents montrent que les services de renseignements avaient repéré Mohamed Merah dès 2009, deux ans après que Abdelkader eut été repéré comme membre de la mouvance islamiste radicale de Toulouse. Les deux frères avaient alors fait l'objet d'une surveillance suivie et de plusieurs notes de la Dcri. L'avocate de Merah, Me Zahia Mokhtari, avait, faut-il le rappeler, porté plainte en France contre le raid de la police, alors qu'elle pouvait le capturer vivant. Elle avait affirmé détenir deux vidéos identiques de 20 minutes chacune dans lesquelles Mohamed Merah dit aux policiers «pourquoi vous me tuez?» (...) «je suis innocent». Selon Me Mokhtari, «Merah a été manipulé et utilisé dans ces opérations par les services français et a ensuite été liquidé pour que la vérité ne voie pas le jour».