«Il existe plus de deux cents films sur Jésus et plus d'une centaine sur Moïse, mais seuls quarante films ont été réalisés sur Mohamed (Qsssl)» Majid Majidi, réalisateur iranien du film sur le Prophète Mohamed (Qsssl) Alors que le Monde arabe vient juste de se calmer suite à la diffusion d'une vidéo américaine préfabriquée et honteuse sur la vie de Mohamed (Qsssl), l'image du Prophète sera une autre fois au centre du débat mais cette fois entre pays musulmans. Cette fois, ce n'est pas le contenu mais bien la représentation du Prophète à l'écran, qui sera l'objet de la contestation. En effet, l'Iran, qui est le plus grand producteur de films, avec près d'une centaine de longs métrages, dont une partie est consacrée sur la religion, s'apprête à sortir un film intitulé Mahomet, Prophète de Dieu, premier volet d'une trilogie censée retracer la vie du fondateur de l'Islam. C'est le réalisateur iranien Majid Majidi, qui avait réalisé notamment Les Enfants du ciel, nominé à l'Oscar du meilleur film étranger en 1998, qui est derrière ce projet, qui irrite le monde islamique qui refuse toute représentation du Prophète. Si la représentation du Prophète Mohamed (Qsssl) n'est pas clairement prohibée par le Coran, l'immense majorité des théologiens musulmans, majoritairement sunnites de tendance wahhabite saoudienne, - la plus puritaine - la condamnent, y voyant une incitation subreptice à l'idolâtrie (awthaniya), pratique strictement bannie, car considérée comme l'un des plus hauts degrés de l'incroyance. Même si aucun pays arabe et musulman n'a exprimé ouvertement son désaccord sur ce film, l'Arabie Saoudite, qui se présente toujours comme la garante des lieux et des préceptes de l'Islam s'oppose à la diffusion de ce film, convaincue que l'initiative iranienne est en réalité une manière détournée de faire l'apologie du chiisme «dissident», au détriment d'un sunnisme pourtant ultra-dominant (90% des croyants musulmans). Cette grande fresque historique, qui devrait être doublée en anglais, arabe, français et espagnol aurait coûté plus de trente millions de dollars, le plus gros budget de ces dernières années pour un film tourné en Iran. Pour les Iraniens, ce film va, au contraire, être bénéfique pour l'image de l'Islam. Sur ce plan, l'Iran, possède une longue tradition de l'image, qui avait commencé par la miniature et le dessin pour se poursuivre au cinéma. Elle a produit des dizaines de films sur les figures prophétiques importantes des religions monothéistes et certains sont même juifs: Abraham, le premier des croyants, Marie, Joseph, Salomon, troisième roi d'Israël. En 1996, une oeuvre iranienne avait déjà déclenché la colère de l'Arabie Saoudite: la série télévisée Imam Ali (un personnage vénéré par les chiites, pour qui il est le véritable successeur de Mohamed (Qsssl). Riyadh, avait proposé de la racheter en totalité pour éviter sa diffusion. Ces dernières années, l'Arabie Saoudite qui n'est pas un pays producteur de films, a investi à travers sa «télévision expatriée» MBC, pour réaliser le feuilleton Omar, qui avait marqué le dernier mois sacré du Ramadhan. Mais la production de ce feuilleton a provoqué un tollé à Téhéran qui n'a pas diffusé le feuilleton sur ses télévisions. Pour les Iraniens, le feuilleton est une hérésie, car les chiites estiment que le deuxième calife Omar est un usurpateur du pouvoir au détriment de... l'imam Ali, cousin et gendre de Mohamed (Qsssl). La guerre des images ne va pas se concentrer entre l'Amérique et le monde musulman, la bataille des images est aujourd'hui concentrée dans le monde musulman entre les chiites et les sunnites. [email protected]