Le jour même de la fin de la grève des lycées, le chef du gouvernement satisfait les préalables énoncés par les archs. Le chef du gouvernement a réussi en quelques jours le tour de force de redresser une situation précaire tant au plan social que politique. Il y a à peine une semaine, les observateurs de la scène nationale ne donnaient pas cher d'un Exécutif en perte de vitesse avec deux gros dossiers sur les bras, à quelques mois d'un rendez-vous politique majeur. En effet, l'état de pourrissement auquel est parvenue la situation dans le secteur de l'éducation nationale après plus de deux mois de grève des enseignants du secondaire et les réactions quelque peu radicales de toutes les ailes du mouvement citoyen, n'auguraient rien de bon pour ce qui concerne la stabilité du pays. Beaucoup voyaient se profiler l'année blanche et un inquiétant retour aux manifestations de rues en Kabylie avec son cortège de tension et de répressions. En d'autres termes, on craignait un retour à la case départ avec, en prime, un embrasement du front social synonyme d'un dangereux glissement de l'Algérie vers une situation de chaos à quelques encablures de l'élection présidentielle. Ceux qui ont parié sur l'écroulement du gouvernement face aux pressions exercées par la base sociale, ne connaissaient apparemment pas l'aptitude de Ahmed Ouyahia à se sortir des situations les plus coriaces. Ainsi, le chef de l'Exécutif a su jouer du bâton et de la carotte sur les deux dossiers. Certes de nombreux observateurs ont estimé qu'il a pris un gros risque en jouant la carte de la radiation des 50.000 enseignants grévistes. Il faut admettre en effet, que la menace brandie était tellement irréaliste que presque personne ne croyait à la faisabilité de la chose. Aussi, l'on tablait sur un pourrissement total de la situation et un scénario catastrophe avait même été imaginé à l'occasion du prochain rendez-vous électoral. Mais force est de constater que «la mise» d'Ouyahia, bien que très osée, lui aura permis de sauver, en apparence en tout cas, l'année scolaire en amenant les professeurs des lycées à réintégrer leurs postes après plus de deux mois de débrayage. Le jour même de la fin de la grève, et contre toute attente, le même chef du gouvernement instruit toutes les entreprises et l'institution judiciaire aux fins de mettre en pratique les préalables énoncés par les archs pour l'ouverture du dialogue. Sur ce dossier, de loin le plus épineux de la mandature de Bouteflika, Ouyahia affiche clairement la couleur en mettant le mouvement citoyen devant une situation où sa seule réaction ne peut être que d'aller vers la table des négociations avec les représentants du gouvernement. Ainsi en l'espace de quelques jours seulement, la tension largement perceptible, il y a une semaine a baissé de plusieurs crans et la situation semble se normaliser dans le sens d'une plus grande stabilité des «voyants» socio-politiques qui passent désormais au vert. En fait, si la mission du chef du gouvernement était de baliser la voie au chef de l'Etat d'ici à l'élection présidentielle, il aura réussi à désamorcer «deux engins explosifs» sur le chemin du président de la République. «L'artificier» de Bouteflika, comme on pourrait le qualifier, a bien fait son travail en attendant d'autres embûches. Il lui reste, pour l'heure, le dossier du relogement des sinistrés du séisme de Boumerdès qui peut connaître des développements négatifs dans le cas où l'engagement du chef de l'Etat ne soit pas tenu pour une raison ou une autre. A ce niveau, on affirme de sources gouvernementales que des instructions fermes sont données à Ouyahia pour accélérer la cadence aux fins d'être au rendez-vous de la fin décembre. Le chef du gouvernement semble bien mener sa barque. Un facteur qui conforte sa position au sein du RND et réduit ses opposants au sein de ce parti à leur plus simple expression. D'ailleurs, la réunion du Conseil national du RND prévue pour le 16 décembre prochain a toutes les chances de tourner à son avantage grâce au règlement des dossiers de la grève et du mouvement citoyen.