Le couple Chaulet Ni les arrestations, ni les intimidations, ni le harcèlement de la police n'ont pu le dévier de son combat pour une Algérie libre. Farouche militant anticolonialiste, le professeur Pierre Chaulet nous a quittés hier à l'âge de 82 ans à Alger des suites d'un cancer qui le rongeait depuis plusieurs années. L'annonce de sa mort très largement répercutée par nos médias on line et ensuite la Radio nationale a semé l'émoi au sein des patriotes algériens et de tous ceux qui connaissent la valeur de cet homme d'exception. Né le 27 mars 1930 à Alger, Pierre Chaulet a lutté contre le colonialisme français aux côtés de figures emblématiques de la Révolution algérienne. Il était un grand ami de Abane Ramdane et de Krim Belkacem. L'histoire de la guerre de Libération est chargée d'anecdotes, de faits d'armes. Lorsque le défunt Chaulet et son épouse Claudine transportaient et faisaient déplacer ces chefs de la révolution avec leur mythique Citroën Chevrolet. Combien de fois, en effet, Abane ou Krim avaient échappé aux barrages de l'armée française alors qu'ils étaient transportés par le Pr Chaulet? Lui et son épouse étaient des membres actifs des réseaux clandestins du FLN. Ni les arrestations, ni les intimidations ni le harcèlement de la police n'ont pu le dévier de son combat pour que l'Algérie se libère du joug colonial. Le Pr Chaulet a été expulsé en France durant la Guerre d'Algérie mais a réussi, avec sa femme Claudine qui avait également épousé la cause algérienne, à rejoindre le FLN en Tunisie où il a continué ses activités de résistant à la fois comme médecin et comme journaliste au journal El Moudjahid. Il est l'un des membres fondateurs de l'agence de presse algérienne APS, à Tunis en 1961. A Tunis, il retrouve Abane à la rue des Entrepreneurs où était le siège du journal El Moudjahid. Il a effectué des opérations secrètes avec les combattants du FLN. De même qu'il a accompli avec brio et conviction de nombreuses missions pour le Gouvernement provisoire de la République algérienne (Gpra) en Tunisie et dans d'autres pays.. D'origine française, le Pr Chaulet a acquis la nationalité algérienne en 1963 conformément aux principes du FLN contenus dans l'appel du 1er Novembre 1954, qui a déclenché la guerre. Fonctionnaire de l'Etat algérien en qualité de professeur de médecine, il était expert de la tuberculose auprès de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) depuis 1981. Pierre Chaulet est notamment connu pour son travail remarquable dans la lutte contre la tuberculose, qu'il a initiée au lendemain de l'indépendance. Il a été élu à la première Assemblée populaire communale de la ville d'Alger, élu comme vice-président de l'Observatoire national des droits de l'homme (1992-1996), puis chargé de mission pour la santé auprès du chef du gouvernement (1992-1994). Durant la tragédie nationale des années 1990, il a été menacé de mort et forcé à un exil de plus de quatre ans. A son retour, et bien qu'ayant pris sa retraite, il a apporté sa contribution d'expert OMS et de consultant en santé publique au ministère de la Santé et au Conseil national économique et social. Avec Claudine, qui a été professeure de sociologie à l'Université d'Alger, il a co-écrit un livre relatant leur itinéraire: «Le choix de l'Algérie: deux voix, une mémoire», sorti en 2012 aux éditions Barzakh. Les sacrifices de ce grand homme sont-ils vains? Son héritage intellectuel, politique et de militant est-il parvenu aux nouvelles générations? Il y a quelques années, il confiait à des amis qui lui sont proches qu'il aurait souhaité apporter sa contribution au plan politique dans son pays, l'Algérie. L'indépendance du pays acquise, le Dr Chaulet a attendu, attendu... mais on n'a jamais frappé à sa porte pour le solliciter ne serait-ce que pour une carrière diplomatique. Ainsi meurent les héros. Dans la grandeur et la dignité. Selon un de ses proches, le Pr Chaulet a demandé à être enterré à côté de la tombe d'Henri Maillot, un autre pied-noir qui avait rejoint les rangs des indépendantistes, au cimetière chrétien d'El Madania à Alger.