L'islamisme armé est-il à ce point intrinsèque à l'islamisme politique? L'islamisme politique aboutit-il, nécessairement, à l'insurrection armée? Toutes les parties prenantes, qui ont opté pour une réconciliation nationale, l'ont fait en ayant bien en vue d'y intégrer «ce qui reste» de l'ex-FIS. Ceux qui refusent de souscrire à cette démarche affirment qu'elle inclut un «dialogue sans exclusive», euphémisme qui fait adhérer l'ex-FIS au débat, chose qu'ils rejettent. C'est-à-dire, bon an mal an, depuis 1990, l'islamisme reste au coeur du débat politique en Algérie. L'islamisme armé est-il à ce point intrinsèque à l'islamisme politique? L'islamisme politique aboutit-il, nécessairement, à l'insurrection armée? Telles peuvent être les questions lancinantes qui se posent en termes marqués au fer rouge dans le débat politique actuel. On peut présenter l'islamisme affiché par des partis, le MSP ou Ennahda, comme un modèle d'islamisme «constitutionnel», qui aurait réussi à s'imprégner des lois de la République. Mais il faut revenir à la base, effervescente et grouillante, pour s'apercevoir que cet islamisme politique, fait de compromis et dilué dans les textes de lois, est carrément rejeté et mis à l'index. Peut-on alors prévoir sereinement un retour de l'ex-FIS? Même amoindri, même privé de ses éléments les plus actifs, même avec une autre appellation, ce courant islamiste radical qui avait promis, dans un bâillement, d'avaler le monde, fait encore peur. Théoriquement, il reste responsable de toute la tragédie qui a frappé l'Algérie, depuis 1990 et ce, à ce jour. Il doit encore répondre, de façon indirecte, certes, des horreurs commises par les groupes armés, sous quelque appellation qu'il agisse. A défaut de revenir par la porte, l'ex-FIS, sous l'égide de la «Ligue de l'appel de la nation», est déjà revenu. Par la fenêtre. Et s'il n'éveille ni engouement ni liesse, parmi les foules, il faut attendre la libération des chouyoukh et principalement celle de Ali Benhadj, figure emblématique de la mouvance, pour se prononcer. La réalité sociologique de l'islamisme en Algérie est un fait. Non sa prépondérance politique. Et c'est malheureusement ce qui est incrusté dans les esprits. La crise sociale continue d'être le bailleur de fonds par excellence de la mouvance islamiste, et les échecs étalés, les uns après les autres, nourrissent encore un utopique et salutaire retour à l'islamisme. L'exemple de Taleb Ibrahimi, en matière d'utilisation des données immédiates dans son discours politique, est édifiant. Usant des mêmes credo que l'ex-FIS et revenant à un «langage de base» pour sensibiliser les foules de sympathisants, Taleb Ibrahimi a obtenu une bonne deuxième place, derrière le futur Président de la République et ce, malgré son retrait en dernière minute des présidentielles. Le débat sur l'islamisme a encore de quoi s'alimenter pour longtemps encore, entre les «politiques», mis en quarantaine et les «armés» qui occupent les devants d'un quotidien sanglant. En fait, et souvent, entre l'islamisme constitutionnel et l'islamisme insurrectionnel, il y a une crise qui perdure