L'avenir de la principale force politique de l'opposition française, minée par une guerre des chefs qui occupe le vide politique laissé par le retrait de Nicolas Sarkozy, était suspendue à l'intervention hier d'Alain Juppé, pessimiste sur ses chances de succès. «Je me place dans l'espoir de réussir même si j'ai très peu de chance», a déclaré M.Juppé, 67 ans, ex-ministre des Affaires étrangères, comparé en France à une sorte de «casque bleu» dans la guerre entre l'ex-Premier ministre François Fillon, 58 ans, et le très ambitieux Jean-François Copé, 48 ans. M.Juppé devait recevoir à 18h00 GMT MM. Fillon et Copé, qui se disputent la présidence de l'Union pour un mouvement populaire (UMP, droite) à coups de déclarations fracassantes et de procédures devant des instances internes. Il s'agira de leur première rencontre depuis les élections internes de dimanche dernier. M.Copé, a été proclamé lundi dernier vainqueur par 50,03% (98 voix d'avance sur plus de 174.000 votants). M.Fillon, a contesté ce résultat, parce que la commission d'organisation avait oublié de compter des bulletins des DOM. «S'ils n'acceptent pas (mes conditions), je me retire, ce n'est pas un drame, ils se débrouilleront», a dit M.Juppé à la chaîne iTélé et la radio Europe 1. «Je fais quand même confiance à ma force de conviction. C'est l'intérêt des deux protagonistes. Ils ont intérêt l'un et l'autre à ce que ça marche», a poursuivi M.Juppé, lui aussi ancien Premier ministre (1995-97). Avant la rencontre, la situation était toujours tendue. Une «commission nationale des recours de l'UMP» a tenté de se réunir pour trancher les litiges électoraux, avec un grand luxe de précaution: tous les débats devaient être filmés, enregistrés et contrôlés par huissier. Au bout d'un peu plus d'une heure, les caméras auront surtout enregistré le départ du directeur de campagne de François Fillon, Eric Ciotti. «Nous avons décidé de nous retirer et d'attendre la démarche de médiation qu'a engagée Alain Juppé», ont estimé les pro-Fillon. Le camp Fillon a «choisi de déserter», a commenté quelques minutes plus tard un avocat du camp Copé, maître Francis Szpiner, énième rebondissement d'un feuilleton politique sans précédent qui tient en haleine -ou fait rire- la France depuis sept jours. 71% des Français et 67% des sympathisants UMP estiment que ce serait «une bonne chose» de refaire l'élection du président du parti, selon un sondage Ifop pour le Journal du Dimanche auprès d'un échantillon de 1.005 personnes âgées de 18 ans et plus. M.Juppé a estimé que l'ex-président Sarkozy, en retrait de la vie politique, n'avait «pas intérêt» à se mêler de la guerre fratricide qui déchire ses héritiers politiques.