Deux coalitions rivales ont appelé à manifester mardi en Egypte, l'une, islamiste, pour appuyer le référendum constitutionnel contesté prévu samedi, l'autre, de tendance libérale et de gauche, pour exiger son annulation. Voici une présentation de ces formations au coeur de la plus grave crise politique en Egypte depuis l'élection du président Mohamed Morsi en juin. Le Front du salut national (FSN) Présidé par le Prix Nobel de la paix Mohamed El Baradei, il a été formé quelques heures après l'annonce le 22 novembre par le chef de l'Etat Morsi qu'il s'arrogeait des pouvoirs exceptionnels, à l'issue d'une réunion d'urgence au siège du parti libéral Al-Wafd. Ses figures de proue sont M.El Baradei, ancien chef de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Amr Moussa, l'ex-patron de la Ligue arabe, et Hamdeen Sabbahi, qui était arrivé troisième à la présidentielle de mai-juin avec 4,8 millions des voix. Le Front regroupe des partis, groupes et personnalités en majorité de tendance libérale, laïque et de gauche. Parmi les membres du FSN figurent le parti Al-Wafd, le mouvement du Courant populaire de M.Sabbahi (nationaliste de gauche), le Parti égyptien social-démocrate de Mohamed Aboul Ghar et le Parti des Egyptiens libres, fondé par le milliardaire copte (chrétien) Naguib Sawiris. Des personnalités comme le bâtonnier Sameh Achour et l'opposant de longue date George Ishaq ainsi que le mouvement du 6-Avril, qui regroupe des jeunes ayant contribué à lancer la révolte contre Hosni Moubarak l'an dernier, ont aussi rejoint la nouvelle coalition. L'opposition, critiquée par ses partisans pour ne s'être pas unie face aux islamistes lors des dernières élections présidentielle et législatives, a tenté en créant le FSN de former un groupe de poids face au président Morsi. Depuis que ce dernier a fait machine arrière en retirant son décret, la principale revendication de la coalition reste l'annulation du référendum du 15 décembre, que le président a maintenu. Pour l'opposition, le projet de Constitution ouvre la voie à une islamisation accrue de la législation et manque de garanties pour les libertés. Plusieurs de ses membres espèrent que la coalition restera en place, que le référendum se tienne ou non, pour de prochaines élections. La coalition des forces islamistes La puissante confrérie des Frères musulmans, dont le président Morsi est issu, et son bras politique, le Parti de la liberté et de la justice (PLJ), sont les poids lourds de cette coalition qui veut que le référendum se tienne à la date prévue et appelle à voter «oui». Après avoir longtemps été maintenus dans l'illégalité, les Frères musulmans sont la principale force politique du pays et disposent d'un réseau de plusieurs centaines de milliers de militants selon des experts. Le PLJ avait remporté près de la moitié des sièges du Parlement aux dernières législatives, et les salafistes (fondamentalistes) près du quart. Confiante dans sa capacité à mobiliser, la coalition entend organiser deux grandes marches aujourd'hui au Caire pour montrer «son soutien au projet de Constitution et à la légitimité du président». Elle a déjà commencé à faire campagne pour le «oui», notamment en distribuant des prospectus affirmant que la Constitution était «un pas en avant vers la stabilité». La commission qui a rédigé le projet de loi fondamentale adopté récemment et en toute hâte était dominée par les islamistes. La coalition comprend les partis salafistes Al-Nour, Al-Assala et Al-Islah, qui ont fait d'une application plus large de la chari'â leur cheval de bataille. La Gamaa Islamiya, un groupe islamiste ultraconservateur qui fut avec le Jihad islamique à l'origine d'une vague d'attentats dans les années 1990, avant de renoncer à la violence, fait aussi partie de la coalition.