La situation risque de s'enliser avec la poursuite des manifestations dans d'autres régions du pays. Le ministre de l'Intérieur qui a assisté au vote de la loi électorale hier, a filé à l'anglaise juste après la fin des travaux de la plénière. Invité par le vice-président de l'assemblée, Abdelkader Zidouk, à prendre la parole suite au vote de la loi, des dizaines de pancartes surgissent derrière lui: «Ne touchez pas au caractère républicain de l'Etat.» C'est sous les cris de «Zerhouni assassin», «Zerhouni dehors» proférés par les députés du FLN que le premier policier du pays a quitté l'hémicycle escorté de très près par sa garde rapprochée. Emporté par l'élan d'une foule compacte derrière lui, il a été «poussé» à l'intérieur de son véhicule laissant sur leur faim les nombreux journalistes qui n'ont pas pu l'approcher. Les députés du FLN ont porté la contestation à l'intérieur de l'hémicycle. Dès le début des travaux de la séance plénière, Abbas Mekhalif, chef du groupe parlementaire du FLN, la main gauche bandée suite à une blessure lors de la manifestation de dimanche, annonce la couleur et dénonce officiellement la «répression» subie par les élus de son parti. «Un groupe de députés a fait l'objet de violences et d'arrestations au vu de tout le monde sur instigation de la puissance publique», a-t-il déclaré. Il a indiqué au passage qu'un membre du bureau politique, Abdelaziz Djoghri, a été «embarqué lors de la manifestation puis libéré hier, et présenté le même jour au procureur et mis sous contrôle judiciaire pour attroupement et atteinte à l'ordre public». Le groupe parlementaire du FLN, réuni après les travaux d'hier, a exprimé son indignation devant cette «utilisation abusive et inappropriée de moyens de répression dans le seul objectif de faire taire la voix des élus du peuple», et prend à témoin l'opinion publique devant «cette nouvelle violation des lois de la République à travers le non-respect du principe de l'immunité parlementaire stipulé dans la Constitution et appliqué internationalement» et a fait endosser «les conséquences dangereuses qui résulteront (...) au président de la République et au ministre de l'Intérieur». Dans sa réaction, le groupe parlementaire du FLN a également réitéré sa revendication relative à la démission du président de la République «en ce qu'il représente une menace à la stabilité de notre pays et un danger lancinant pour l'ordre et la sécurité publics et une insulte à la dignité du peuple algérien et à la souveraineté des assemblées élues». Dans cette série de réactions, le conseil du FLN en France et des comités de soutien à la candidature de Ali Benflis ont appelé, dans des déclarations, les Algériennes et les Algériens installés en France et en Europe «à se mobiliser contre la dictature et refuser le fait accompli pour préserver le processus démocratique dans notre pays». Le comité a estimé que «le coup de force de Bouteflika a plongé le pays dans l'incertitude et l'instabilité». Réuni dimanche dernier, sous la présidence d'Arezki Aït Ouazzou, président de l'Union des Algériens en France et en Europe (Uafe) le collectif de la communauté algérienne en France pour le soutien à la candidature de Benflis a fermement condamné «tous ces actes de violence dont la responsabilité légale incombe au ministre de l'Intérieur. A ce titre, le collectif a revendiqué la démission du ministre de l'Intérieur dont les actes de violence et de mépris à l'égard de toute expression libre sont devenus une pratique courante.» La situation risque de s'enliser au moment où l'on annonce d'autres mesures contre le FLN, comme la mise sous scellés de ses locaux avant qu'il fasse recours au Conseil d'Etat.