Fête traditionnelle, trois fois millénaire, Yennayer est célébré dans toute l'Algérie. Yennayer est d'abord l'occasion de nous rencontrer et fêter la nouvelle année dans un bain culturel amazigh. C'est également l'occasion pour nous de nous rappeler notre devoir de lutter pour la survie de notre culture et de notre identité. Cette année, pour fêter Yennayer, le nouvel an berbère, des manifestations culturelles ont été programmées tout au long de la journée de lundi. Ainsi et sous le générique de «Tradition et élément du patrimoine» l'Etablissement Arts et Culture a élaboré un programme riche, où tradition s'est conjuguée avec modernité, à travers des expositions, de la mode, de la musique et même pour les plus «intellos» de la poésie et des conférences, qui relatent l'histoire de Yennayer. Le bal s'est ouvert, tôt le matin, à la médiathèque Pichon (Place Audin), sur des rythmes de la Zorna et des Tbabla, avec une exposition de bijoux, tapis, plats et habits traditionnels, objets anciens ainsi que des sculptures sur bois. La place Audin s'est appropriée la fête, où les passants se sont arrêtés, par curiosité ou par intérêt, devant les plateaux grandeur nature qui ont égayé cette fête. Un grand couscous «seksu sou yazudh» a été offert à l'heure du déjeuner pour souhaiter une bonne année à la manière kabyle. L'après-midi un récital poétique a été donné, après une conférence animée sous le thème de Yennayer. La fin des manifestations fut de toute beauté, avec un défilé de mode couronné par un gala artistique de chants kabyles donné à la salle Ibn Khaldoun. On s'est approché des gens qui ont assisté aux festivités pour savoir ce que Yennayer signifie pour eux, mais notre surprise était grande quand la majorité qu'on a interrogée ignore complètement l'histoire de Yennayer. Pour certain, c'est une occasion comme une autre pour faire la fête, pour d'autres c'est plutôt un mythe qui est lié à l'histoire de l'Afrique du nord. Mais qu'est-ce que c'est vraiment Yennayer? Yennayer remonte, selon une hypothèse désormais établie, à la conquête de l'Egypte par Chachnaq 1er en l'an 950 avant J.C. Il y fonda la XXIIe dynastie. Yennayer c'est aussi un mythe où une pratique est née : la fête. Yennayer sollicite Furar pour lui prêter un jour afin de punir une vieille femme qui s'était moquée de lui. Ce jour-là, un remarquable orage se lève poursuivant la femme jusqu'à l'étouffer. Sa mort symbolisera le sort de celui qui défiera la nature. La légende se déroulait durant la période qui sépare les deux cycles solaires, les solstices et équinoxes. Depuis, nos ancêtres ne cesseront de célébrer cette journée. Yennayer correspond également au début du calendrier agricole chez les Amazighs, d'où le fait qu'il est célébré traditionnellement selon les rites agraires. Il coïncide avec le 12 janvier du calendrier grégorien. Au Djurdjura, à Béchar, dans les Aurès, dans l'Ahaggar, Yennayer ou Yennar est l'occasion de fête, de liesse populaire voire d'un carnaval, comme à Tlemcen. Dans certaines régions d'Algérie, Oran, Beni Zennassen, etc., la célébration de Yennayer n'a rien perdu de sa fraîcheur ni de son authenticité. Chez ces derniers, certains s'abstiennent de manger des aliments épicés ou amers par peur de présager une année du même goût. Le repas de Yennayer est conditionné par les récoltes selon les régions mais aussi par les moyens des uns et des autres. Les aliments servis vont symboliser la richesse, la fertilité ou l'abondance. Il est ainsi des irecman (bouillie de blé et de fèves) ou le coeur du palmier chez les Beni-Hawa : pas question de rater le repas de bénédiction qu'est celui de Yennayer. Le bon présage de Yennayer fait aussi qu'on lui associe d'autres événements familiaux comme la première coupe de cheveux du dernier né ou le mariage. C'est aussi l'occasion de s'offrir et d'offrir de beaux habits neufs et autres cadeaux notamment aux jeunes filles, comme dans l'Ahaggar. Fête traditionnelle, trois fois millénaire, Yennayer, célébrée dans toute l'Algérie, en même temps et régulièrement, gagnerait à être inscrite dans l'agenda officiel au même titre que les autres fêtes dites légales.