De l'avis des experts, le manque de transparence et la mauvaise gestion sont à l'origine des scandales de corruption qui ébranlent nos entreprises. Le scandale de Sonatrach remet au goût du jour tout le système de gestion des deniers publics. Alors que les scandales de corruption se succèdent, il est temps de faire le diagnostic pour cerner les raisons de ce phénomène qui tend à se banaliser. Absence de transparence, faille dans le dispositif juridique de passation des marchés publics et opacité dans la gestion... sont autant de facteurs à l'origine des cas de malversations enregistrées au cours de ces dernières années. Pour mieux comprendre l'origine du mal, des experts nous ont livré leurs analyses. De l'avis de Abderrahmane Mebtoul, professeur des universités, expert international, la faiblesse du management stratégique au niveau des entreprises comme Sonatrach explique les scandales financiers. Analysant le cas de Sonatrach, qui est au coeur d'un grand scandale, l'expert relève le manque de transparence dans les comptes. «Sonatrach est caractérisée par la faiblesse de comptes transparents, ce qui donne à tort ou à raison des supputations nuisibles à sa réputation», soutient-il dans une contribution à L'Expression. Sonatrach n'est pas un cas unique. Toute l'économie algérienne souffre de ce problème. M.Mebtoul s'interroge d'ailleurs sur ce point: «Combien d'entreprises publiques font la comptabilité analytique qui permet de cerner les coûts et combien de ministères et administrations publiques utilisent la méthode de rationalisation des choix budgétaires pour optimaliser leurs dépenses et rendre le contrôle externe audible?» L'expert explique que ces entités économiques et administratives vivent dans l'opacité qui arrange les prédateurs internes avec des complicités externes. «On ne combat pas la corruption en créant des institutions bureaucratiques peu efficaces sans approfondissement de la réforme globale. On ne combat pas la corruption, sans une nouvelle gouvernance, une profonde moralisation de ceux qui sont chargés de gérer la Cité...», a-t-il conclu. Pour lui, une gestion efficace des ressources impose un réaménagement dans les structures du pouvoir pour se libérer des aléas de la rente. Cette question devrait faire l'objet d'un débat au sein de la société civile. De son côté, l'expert en économie, Abdelmalek Serraï explique que la multiplication des affaires de corruption est liée à plusieurs facteurs. Il cite, en premier lieu, l'absence d'une culture au sein de la société civile. «Nous n'avons pas une culture qui permet de faire le tri entre le bon et le mauvais», a-t-il affirmé, en précisant que le mal est impuni. L'étendue du phénomène de la corruption est due, selon lui, à une dynamique réelle et une diversité des projets lancés comme l'autoroute Est-Ouest. L'expert accuse également les sociétés étrangères d'être responsables. «Il y a une attitude très négative des sociétés étrangères qui se permettent d'utiliser tous les moyens illégaux pour arracher des marchés», a-t-il dénoncé. Notre interlocuteur rappelle le fameux rapport du président Clinton qui relève, que 4000 organisations mafieuses vivent des entrées des pays sous-développés. Dans son analyse, M.Serraï reconnaît que les lois algériennes manquent de clarté. «Il y a beaucoup de contradictions dans les lois et des opérateurs véreux profitent de ces vides pour détourner des fonds», a-t-il fait savoir. La bureaucratie est également à l'origine de l'expansion de ce phénomène. «Il y a tellement de lourdeur et un manque flagrant en visibilité dans la gestion», a-t-il dit. M. Serraï pense que la presse doit jouer son rôle en renforçant le travail d'investigation pour lutter contre ce phénomène. Pour lui, il faut que l'Algérie soit plus forte au niveau des relations internationales pour dissuader toute tentative de corruption. Selon l'expert, l'Algérie n'a pas perdu de l'argent, mais elle a perdu en termes de qualité des travaux et de transfert des technologies.