Le gouvernement de Mucharraf est devant une situation très embarrassante. Plusieurs guerriers de l'ethnie pachtoune composant un convoi d'une centaine de véhicules ont passé la nuit au nord de Peshawar où ils attendent un ordre des taliban pour rejoindre le djihad. Ces Pachtounes conduits par Soofi Mohammad, chef du Mouvement pour la stricte application du code islamique, seraient au nombre de 10.000, selon leur porte-parole, et 6000 selon d'autres estimations. Le gouvernement pakistanais se trouve ainsi dans une situation embarrassante devant ces guerriers armés de lance-roquettes, de fusils d'assaut, d'épées et de haches. Si jusque-là, Mucharraf a pu contenir les manifestations des islamistes quasi quotidiennes depuis les frappes sur l'Afghanistan, il lui sera difficile aujourd'hui de s'éloigner de l'enlisement. Surtout que la guerre américaine contre les taliban s'inscrit dans la durée et que les sentiments pro-taliban sont profonds dans les régions tribales qui bordent la frontière afghane. Il faut ajouter à ce signe majeur, d'autres foyers de tension. Déjà, depuis jeudi, environ 3000 hommes armés ont bloqué la route de Karakouram qui relie le Pakistan à la Chine, dans l'extrême nord du pays. Ils se sont engagés à maintenir le blocus tant que le Pakistan continuera de soutenir la campagne américaine en Afghanistan, et tant que des dirigeants islamistes emprisonnés ne sont pas libérés. Etant le seul pays à maintenir des relations diplomatiques avec les taliban, tout en prêtant aux USA certaines de ses bases aériennes, le Pakistan risque de payer lourdement sa politique. L'attaque d'une église, hier, à l'est du pays qui a fait treize morts, et l'explosion d'une bombe dans un autobus à Quetta (2 morts et plusieurs blessés) ne sont-elles pas des signes forts d'un embrasement au Pakistan?