La conférence des Nations unies sur l'Afghanistan s'ouvrira finalement, mardi à Bonn au lieu de Berlin. Des complications auraient surgi retardant la tenue de la réunion inter-afghane. Sur le terrain, les combats se poursuivent autour de la ville de Kunduz toujours défendue avec acharnement par les taliban soutenus par des mercenaires arabes. A Kandahar, fief du mollah Mohammed Omar, la situation demeure confuse et des nouvelles contradictoires continuent de circuler quant au sort du chef taliban, qui se serait, selon certaines sources, replié sur le maquis, alors que l'on ne sait toujours pas ce qu'il est advenu du leader de l'organisation Al-Qaîda, Oussama Ben Laden, présumé responsable des attentats anti-américains du 11 septembre, et objectif affirmé des frappes américaines contre l'Afghanistan. En fait, la priorité des Etats-Unis demeure l'élimination de Ben Laden auquel sont imputées les attaques contre les tours jumelles qui ont occasionné la mort de près de 4.200 personnes. Sur le front afghan, des divergences seraient apparues entre la composante de la coalition antitaliban. Ces désaccords d'ordre militaire, semble-t-il, ont trait à la neutralisation des dernières poches de résistance talibane dans le Nord. Ce qui est en fait fâcheux, c'est que ces divergences surviennent au moment où l'ONU convoque une conférence de réconciliation interafghane à Bonn (ancienne capitale de la RFA). Ces mésententes entre les alliés harazas, ouzbeks et tadjiks interviennent alors que d'aucuns attendaient de ces factions plus de pondération au moment où l'ONU tente de réunir une conférence sur l'avenir de l'Afghanistan. Un avenir qui, en tout état de cause, ne peut être construit que par les fils de ce pays qui n'en finit pas de payer le prix fort. La réunion de Bonn est fondamentale, car elle doit participer à poser les principes du processus de retour à la paix et de reconstruction du pays. En fait à Bonn c'est la mise en oeuvre d'un processus politique devant aboutir à l'établissement d'une administration collégiale et représentative de toutes les ethnies et tendances afghanes qui seront en débat. L'ONU, organisatrice de la conférence de réconciliation interafghane, consciente de la nécessaire disponibilité de toutes les parties afghanes, appelle à la participation de toutes les factions y compris les femmes afghanes (elles représentent selon des données des Nations unies, 65% de la population totale de l'Afghanistan estimée à 26 millions d'habitants). Lakhdar Brahimi, représentant spécial du secrétaire général de l'ONU, qui présidera la conférence, a quitté New York, hier, à destination de Bonn à la tête d'une importante délégation de l'ONU d'une trentaine de personnes. De son côté, le ministère allemand des Affaires étrangères a annoncé que les délégations afghanes comprendront des membres de l'Alliance du Nord (coalition des minorités ethniques), des envoyés de l'ex-roi Mohammed Zaher Shah, des représentants du «processus de Chypre» composé de Harazas (chiites) et de proches de Gulbeddin Hekmatyar appuyé par Téhéran, des représentants du «processus de Peshawar» conduit par Pir Syed Ahmed Galiani (Pachtoune) soutenu par Islamabad. Voulant sans doute détendre l'atmosphère, le président Burhanuddin Rabbani (de l'ethnie tadjike) a annoncé d'emblée, dans un entretien au quotidien britannique The Daily Telegraph, qu'il «n'avait pas d'ambitions personnelles». Il est vrai que le président Rabbani est fortement contesté par les Pachtounes. Reste, c'est cela le plus difficile et c'est l'enjeu principal de la conférence de Bonn, à trouver un terrain d'entente entre les diverses parties afghanes pour essayer de sortir leur pays du chaos où il est plongé depuis maintenant 23 ans. Un pari que l'ONU veut absolument remporter. Au vu de la tournure que prend la préparation de cette conférence interafghane, c'est encore la chose la moins évidente.