Radio France International a complètement dérapé dans l'analyse du match Algérie-Maroc. «Le Maroc a gagné grâce à ses individualités. L'Algérie a perdu pour ne pas avoir cherché à jouer. Dans ce duel de casseurs il y a eu deux perdants: le football et l'Afrique». Cette analyse émane d'un envoyé spécial, pour ne pas dire très spécial, de Radio France Internationale à la coupe d'Afrique des nations de football. Elle se veut être l'opinion d'un «grand» connaisseur de football, tellement grand que l'intéressé s'imagine que l'on doit s'aplatir devant lui. Le papier qu'il a rédigé n'est pas signé. Notre monsieur ne veut, peut-être pas, que l'on sache quel est le véritable auteur d'un tel brûlot plein de fiel et de haine contre tout ce qui est arabe et africain. Un confrère français rencontré à Sousse, sans vouloir nous dévoiler son nom, nous a, tout de même, indiqué que cet envoyé spécial n'était pas à Sfax ce jour-là. Apparemment, il a une excuse puisque son opinion n'a pu se faire qu'au travers du petit écran ou dû «on-dit». En tout cas, il n'a pas du voir le même match que nous qui étions bien à Sfax. On nous rétorquera qu'en notre qualité d'Algérien, il est naturel que nous fassions l'impasse sur d'éventuels débordements qui auraient pu avoir lieu entre les joueurs. Le fait est que nos confrères qu'ils soient algériens, marocains, tunisiens, français, camerounais, allemands ou autres n'ont, dans aucun de leurs écrits, fait mention d'un quelconque jeu dur sur le terrain. Notre gars de RFI ne s'arrête pas là. Plus loin il fait état «d'une véritable bataille de chiffonniers en milieu de terrain». Et notre donneur de leçons de poursuivre à propos de la seconde mi-temps: «la chaleur des vestiaires n'avait pas modéré les intentions belliqueuses des protagonistes. On était chaque fois à la limite de l'attentat et on ne savait pas ce qui pourrait arrêter le massacre. L'arbitre libyen était dépassé par la violence des contacts. Il aurait du sortir le rouge pour apaiser les esprits, le carton jaune ne servant à rien. Mais sans doute dans une ambiance hypertendue n'en eût-il pas le courage. On n'avait pas vu de football au cours de la phase initiale». Il termine son «analyse» en faisant référence aux incidents d'après-match: «le public a-t-il déclenché ce climat de guerre civile entre les deux équipes ou bien les joueurs sont-ils venus avec l'intention d'en découdre, excitant par leur attitude le public? Sans doute un peu des deux. En tout cas, une détestable après-midi de football à Sfax». En somme, à le croire, les deux équipes n'étaient pas entrées sur le terrain pour jouer au football mais pour se faire la guerre. Notre gars est certainement de ceux qui pensent qu'entre un Algérien et un Marocain il est impossible de parler de fraternité et de fair-play. Les deux, selon lui, sont nés pour se cogner. De voir que ce match, en dépit de l'extrême tension qui l'entourait en raison de la ferveur populaire qui s'était emparée de la ville de Sfax et de son stade et de l'importance de l'enjeu, se déroulait normalement sur le terrain sous la conduite d'un arbitre qui a su maîtriser son sujet, de voir qu'à aucun moment les supporters marocains, en très nette infériorité, n'ont été pris à partie par les fans algériens, de voir, enfin, à l'issue du coup de sifflet final, les joueurs des deux camps se donner l'accolade, a dù lui faire monter les degrés au cerveau au point de nous pondre un article à l'opposé de tout ce qui s'était passé. Mais, au fait, était-il, seulement, au stade? On a appris que non. La très «sérieuse» RFI nous donne un aperçu de ce que peut être une analyse avec son objectivité et sa rigueur. L'équipe marocaine a battu celle d'Algérie et les joueurs des deux camps se sont quittés en frères et en amis. L'essentiel est là, n'en déplaise à ce haineux de la plume qui pense que le football peut être une guerre. De notre envoyé spécial