La corporation des robes noires va enfin se doter d'une loi régissant leur profession, un texte version Mohamed Charfi, abrogeant de fait la loi controversée de son prédécesseur Tayeb Belaïz. La loi vient après 20 ans de retard, fait-on remarquer. Dans ce contexte, «l'Algérie reste l'un des rares pays où les lois sont abrogées au lieu d'être tout simplement amendées quand elles présentent des lacunes», commente Me Mustapha Bouchachi qui est également député du FFS. Il était temps que la corporation ait sa loi d'autant plus que la dégradation des conditions et des droits de la défense ainsi que des graves dérives dans l'exercice judiciaire sont constatées quotidiennement dans les différentes institutions judiciaires, indiquent d'autres. Certains parlementaires parlent de l'expédition de ladite loi à l'image du chef du groupe parlementaire de l'Alliance de l'Algérie verte (AAV), Athmane Laouar. Ce député indique qu'ils ont été informés par SMS à propos de l'examen de cette loi, mercredi dernier. Le groupe parlementaire de l'AAV a plaidé pour la révision de l'article 24 de ladite loi. Tandis que l'autre député islamiste, Lahdhar Benkhelaf du parti Al Adala, souhaite la suppression de l'article «scandaleux» prévoyant des sanctions contre l'avocat lorsque ce dernier commet un incident d'audience. Cet article consacre le musellement et bâillonne du coup les droits de la défense du justiciable, selon ces avocats. Le président du groupe parlementaire réfute l'idée de l'expédition de cette loi puisqu'elle figurait déjà au menu de la sixième législature. Ce projet de loi a bénéficié d'une large consultation, note-t-il. La commission juridique de l'assemblée a reçu les magistrats de la Cour suprême, ceux du Conseil d'Etat, les bâtonniers et le recteur de la faculté de droit d'Alger, indique-t-il. M.Taâzibt, député du Parti des travailleurs, relève toutefois que «la loi consacre deux collèges d'avocats». Ce député explique que «si l'article 2 définit la profession de l'avocat comme fonction libérale, en revanche, elle a institué le salariat en considérant les jeunes avocats stagiaires comme des salariés contractuels. Or, ce type de contrat n'est pas prévu ou conforme aux dispositions du Code du travail». Une autre aberration constatée est liée au fait qu'il est exigé du jeune avocat de justifier des mandats au niveau du Conseil du bâtonnât pour prétendre au poste de bâtonnier. Maître Mustapha Bouchachi est du même avis concernant cette remarque liée à l'accès au poste de bâtonnier soumis au nombre de mandats. En outre, il considère que le délai d'un mois accordé au barreau pour refaire les élections quand celles-ci sont invalidées par le Conseil d'Etat, est pratiquement insuffisant. M.Bouchachi émet des réserves quant au transfert systématique des délibérations des associations d'avocats au ministre comme il ne voit pas l'utilité de soumettre les agréments des collectifs, cabinets ou conseils d'avocats au ministre. Par ailleurs, l'assemblée a entamé, hier, l'examen du projet de loi, à moitié vide. Quant au ministre de la Justice, garde des Sceaux, Mohamed Charfi, qui a exposé devant l'assemblée une synthèse du projet, a pris le soin d'éviter les journaliste à la fin de la séance plénière. La commission des affaires juridiques, administratives et des libertés de l'APN a, pour sa part, proposé des amendements aux articles relatifs aux cas d'incompatibilité avec l'exercice de la profession d'avocat, aux incidents d'audience et aux cas d'agression contre l'avocat lors de l'exercice de ses fonctions. L'enseignement dans les universités et les établissements de l'enseignement supérieur, est considéré comme un cas d'incompatibilité. L'avocat investi d'un mandat parlementaire ou d'un mandat de président d'une assemblée locale élue ne peut, pendant la durée de ce mandat, exercer la profession d'avocat. Concernant les incidents d'audience survenant entre l'avocat et le magistrat, la commission propose en cas d'incident grave lors de l'audience, la levée immédiate de celle-ci et la dévolution du traitement de ces incidents au président de la juridiction compétente et au délégué du bâtonnier pour un règlement à l'amiable. En cas de non-résolution du problème, l'incident sera soumis au président de la cour et au bâtonnier.