Les avocats appellent au gel de ce projet de loi jusqu'au retour du président de la République en sa qualité de premier magistrat du pays. La nouvelle loi portant organisation de la profession des avocats, que les députés s'apprêtent à voter le 2 juillet prochain, scandalise les robes noires. Le différend opposant les avocats à la tutelle est jugé très profond. «Nous avons été trahis par toutes les institutions, y compris le ministère de la Justice et le Premier ministère», lâche maître Chaoui Abdelhafid. Le principe de l'indépendance de l'avocat est «assassiné par cette loi», déplore-t-il. Avant d'asséner encore que «l'avocat qui a peur du procureur général n'est plus un avocat». Avant de poursuivre que «si auparavant, on a accepté la trêve pour l'apaisement ou l'achat de la paix sociale, la cellule anti-avocat et les autorités ne doivent plus compter sur nous, car nous serons désormais au rendez-vous durant la prochaine rentrée sociale», affirme-t-il. De son côté, Maître Miloud Brahimi appelle au gel de ce projet de loi jusqu'au retour du président de la République en sa qualité de premier magistrat du pays et de bâtonnier honoraire. «Le nouveau statut d'avocat a consacré la régression totale du métier», a souligné, hier, le bâtonnier d'Alger, Maître Abdelmadjid Sellini lors d'une conférence de presse tenue au siège du barreau d'Alger. Maître Bentoumi soupçonne ceux qui sont derrière le dévoiement de la mouture initiale du texte sur laquelle ils se sont entendu avec la tutelle «de mettre une espèce de garde-fou et de tout faire pour se prémunir de la justice». Concernant le bâtonnier national, M.Laouar qui a validé le texte de loi, M.Sellini affirme que ce dernier «n'est qu'un coordinateur et porte-parole, d'autant plus que le Bâtonnât national n'est qu'une institution de réflexion et non de décision». Si la Charte universelle énonce que l'avocat a le droit d'exercer son métier sans restriction dans une totale indépendance et immunité professionnelle et a le devoir de tout mettre en oeuvre pour que son mandant bénéficie de la protection de ses droits et ait un procès équitable, l'actuel statut ne reflète aucunement ces normes universelles et principes généraux, pourtant ratifiés par l'Algérie, souligne-t-il encore. Ce texte de loi qui ne porte aucune trace de l'immunité et droit à la justice «interdit à l'avocat de s'élever contre l'arbitraire et les abus du magistrat», dit-il. Déjà au préambule dudit texte de loi, s'indigne-t-il «on a supprimé les articles 31 et 33 de la Constitution garantissant les libertés et le droit à la défense et l'égalité devant la justice. Ils ont été supprimés pour les remplacer par le visa du Code pénal et le Code de procédures pénales». Avec ce texte, «l'avocat ne pourra plus pouvoir dire au juge «vous faites dans l'arbitraire ou vous violez la loi, ce qui permettra de rectifier le tir pour éviter les injustices», indique-t-il encore. En résumé, dans la philosophie du texte qui se trouve à la chambre basse du Parlement, on a rayé les deux principes fondamentaux sans lesquels il n'y aura plus de défense, à savoir l'indépendance et l'immunité de l'avocat, il a réduit la place et la position de l'avocat en lui suspendant l'épée de Damoclès de la sanction pénale et sous la tutelle du ministère de la Justice, dira Maître Sellini. A l'issue de leur réunion tenue avant-hier,10 barreaux d'Algérie, soit le tiers des effectifs d'avocats, exigent le gel de cette loi, selon le bâtonnier d'Alger qui constitue la locomotive des robes noires fort de ses 6800 avocats. Il est également décidé l'organisation des sit-in régionaux dès lundi prochain par chaque barreaux présent à la réunion. Il s'agit des barreaux de Blida, Médéa, Alger, Setif, Tizi Ouzou, Tlemcen, Mascara, Sidi Bel Abbès, Boumerdès et Béjaïa. L'importance du rôle de l'avocat se concrétise dans la protection des droits du citoyen devant la justice et non pas de l'avocat devant la justice. Il (l'avocat...Ndlr) est là pour faire respecter les droits constitutionnels et les libertés devant la justice, indique-t-on.