Le lancement qatari de la version américaine d'Al Jazeera a démarré mal, puisque trois jours seulement après le début de sa diffusion sur le sol US, le géant américain des télécoms AT and T coupe le signal à la télévision qatarie sur le réseau du câble américain. Al Jazeera America avait pourtant hérité des droits de diffusion du rachat en janvier 2013 de Current TV. AT & T, dont le service de télévision U-verse compte près de 5 millions de clients aux Etats-Unis, justifie cette décision par un «différend contractuel». Le conflit porterait sur la redevance que doit verser l'opérateur à la chaîne pour l'intégrer à son bouquet. Selon les estimations du cabinet SNL Kagan, celle-ci s'élève, en moyenne, à 11 cents par mois et par abonné. Un montant certainement jugé trop important par AT & T pour une chaîne aux audiences non encore avérées et qui resteraient confidentielles. La décision d'AT&T prive ainsi quelque 5 millions de foyers d'Al-Jazeera America, qui avait promis qu'environ 40 millions de foyers auraient accès à ses programmes. «Malheureusement, la décision de AT&T d'effacer unilatéralement Al Jazeera America nous a été présentée avec des arguments indéfendables - une filiale (d'Al-Jazeera) qui a volontairement rompu ses obligations contractuelles», a annoncé la chaîne mardi soir dans un communiqué. «Par conséquent, nous n'avions pas d'autre choix que de lancer cette action (en justice) et mettre en application les droits d'Al-Jazeera America définis par son accord avec AT&T - et obliger AT&T à prendre la bonne décision», a ajouté la chaîne dans son communiqué. Le porte-parole de AT&T Mark Siegel a affirmé de son côté qu'Al-Jazeera n'avait pas respecté ses obligations et que la compagnie de télévisions d'AT&T, U-verse, ne pouvait donc pas diffuser la chaîne. «Suite à notre incapacité à conclure un nouvel accord et en raison de violations de l'accord existant par Al-Jazeera nous avons décidé de ne pas prendre (Al Jazeera) sur U-verse», a expliqué M.Siegel dans un communiqué. Devant cet état de fait, la chaîne qatarie a décidé de réagir avec virulence en portant plainte contre l'opérateur américain devant la justice de l'Etat du Delaware. Elle dénonce une «rupture abusive» des accords de diffusion, basée sur des «arguments indéfendables». La chaîne souhaite que l'opérateur justifie le niveau actuel des commissions. Les 11 cents ont été négociés il y a déjà plusieurs années. Mais, depuis, les audiences de Current TV n'ont jamais été bonnes. Elle attirait à peine 24.000 téléspectateurs en soirée en juillet dernier. Pour de nombreux observateurs et spécialistes de l'audiovisuel, les difficultés d'Al Jazeera America ne font que commencer. Al-Jazeera est également en négociations, pour la diffusion de ses programmes, avec la chaîne de câble du groupe Time Warner. La chaîne financée par le groupe qatari Al Jazeera a démarré mardi aux Etats-Unis à grand renfort de publicité et en promettant un journalisme professionnel. Plusieurs personnalités de l'audiovisuel, à l'image de Tarek Ben Ammar, ont défendu Al Jazeera America indiquant qu'ils feront du travail très professionnel et qu'ils ne tomberont pas dans le clanisme et le régionalisme. La chaîne propose chaque jour 14 heures de direct, des documentaires et débats ainsi qu'à chaque heure pleine un bulletin sur les dernières nouvelles de la journée. Le groupe doit se préparer à une des grandes batailles pour conquérir des parts d'audience aux Etats-Unis, en particulier en raison de son histoire au Proche-Orient. [email protected]