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«L'Algérie ne se fera pas sans vous»
SADI FACE A L'IMMIGRATION ALGERIENNE
Publié dans L'Expression le 16 - 03 - 2004

Le meeting du leader du RCD a attiré un nombreux public partagé entre «votants» et «abstentionnistes».
«Nous sommes venus par curiosité.» L'immigration kabyle de Paris a fait le déplacement dans le quartier de Belleville pour écouter le chef du RCD. Il a fallu organiser deux rencontres successives pour permettre à la plus grande majorité d'écouter le candidat Saïd Sadi. «C'est comme au cinéma: il y a plusieurs séances, sauf qu'ici nous ne faisons pas de cinéma», a-t-il ironisé, visiblement satisfait de constater que son aura ne s'est pas érodée. Mais dans les milieux immigrés, la crise de Kabylie a davantage marqué les esprits. «Alors, on vient entendre pour comprendre ce qui pousse le candidat Sadi à l'optimisme, pendant que la grande majorité des Kabyles appellent au boycott de la mascarade électorale», commente un des nombreux jeunes présents dans la salle du syndicat français la Cfdt.
«La présidentielle du mois d'avril est un rendez-vous capital pour l'Algérie (...). La partie n'est pas jouée», martèle Saïd Sadi qui dénonce la tentation de fraude à laquelle travaillent le président Bouteflika et son administration. «Grâce à notre combat et à l'appui de l'immigration, nous ferons échec à cette démarche (...). S'il le faut, nous sortirons dans la rue.» Le sens de la formule toujours aiguisé, le candidat à la présidentielle inscrit cette nouvelle compétition électorale dans le droit fil de son parcours politique. «Je me bats depuis 40 ans pour une Algérie qui offrirait à ses citoyens la dignité et la liberté (...). Il n'est pas lointain le temps où il n'était pas facile de croire que l'Algérie serait pluraliste, où tamazight trouverait sa place... Tout ce pourquoi nous nous sommes battus fait aujourd'hui consensus. Le compromis est possible.» Saïd Sadi prévient, cependant, qu'il a un «optimisme raisonné, mais un optimisme quand même». Car un deuxième mandat pour Abdelaziz Bouteflika «c'est une catastrophe pour le pays».
L'ancien militant des droits de l'homme, qui a connu la prison algérienne, sait son auditoire exigeant. Les 150 morts du printemps noir de la Kabylie n'autorisent pas la langue de bois. Les voix de l'immigration (plus forte proportion de l'immigration algérienne) sont précieuses. Pour les convaincre d'aller voter, Saïd Sadi assure que «l'armée n'a pas de candidat» cette fois. Les preuves? «Pour la première fois, l'armée dit ne pas avoir de candidat. Les militaires évitent de se mêler de l'organisation des élections, l'ex-parti unique (FLN) est durablement fracturé, les bureaux de vote spéciaux réservés aux corps constitués ont été supprimés, et nous sommes en mesure d'obtenir les procès-verbaux», dit Saïd Sadi, qui voudrait transformer «le rejet (de la politique de Bouteflika) en projet». Saïd Sadi fustige la gestion du président sortant qui «a passé quatre ans dans un avion (allusion aux fréquents voyages à l'étranger) et cinq mois dans les wilayas». «Ce qu'il n'a pas fait depuis 1999, il ne le fera pas dans l'avenir.
Aucun président n'a eu autant de conditions favorables que lui (...). S'il a échoué c'est parce qu'il est tout simplement incompétent. Je sais de quoi je parle, car je l'ai connu de près». «Un second mandat pour Bouteflika serait une menace de congoloisation de pays.» Le leader du RCD souligne d'ailleurs l'absence de toute discussion de son bilan. Enfonçant encore le clou, il dénonce le blocage des réformes (économiques, statut de la femme, etc.) par des dirigeants - président, Premier ministre et conseillers inclus - dont «le niveau est inférieur à celui du citoyen (...) Ouyahia veut être un petit Boumediene. Il cherche à acheter des appuis en Kabylie et à exploiter les éléments les plus manipulables et les plus fragiles du mouvement citoyen. C'est un compétiteur du pire. Nous savons que la plate-forme d'El-Kseur n'est pas acceptable pour le pouvoir.»
Le responsable du RCD n'oublie pas, au passage, de décliner un programme : «Je propose un plan Marshall pour les jeunes Algériens. Pour cela, il faut de grands projets (chemins de fer...) qui pourront résorber le chômage des personnes qualifiées. Le problème est plus délicat pour les non-qualifiés (...). L'Algérie a les moyens financiers et la solvabilité nécessaires pour mener de grands projets et des réformes.» Avant de clore chacun de ses deux discours, Saïd Sadi fixe l'assistance et répète: «Cette fois est l'ultime fois où l'Algérie a besoin du vote de l'immigration.» L'assistance applaudit, mais pense toujours «à quoi bon voter?». Les rares tentatives de scander «Sadi président» ne sont pas suivies.
L'immigration algérienne - Benflis a été le premier à organiser des rencontres - sera encore sollicitée par les candidats. Le patron du RCD repartira de nouveau à sa rencontre dans les prochains jours, alors que le président sortant est, lui aussi, attendu dans la capitale française et dans d'autres villes de France et d'Europe probablement. Ses comités de soutien se préparent à livrer la «bataille de l'extérieur». Amara Benyounès, président de l'UDR et membre de la coalition des partisans d'Abdelaziz Bouteflika, a donné le la de la campagne ce week-end, lors de la rencontre des comités de soutien à Paris. Benflis et Sadi inquiètent visiblement le supporter de Bouteflika qui incite les militants à mener une propagande «agressive» et «massive», mais «propre et sans invective».
de notre Bureau à Paris


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